Quel lien y a-t-il entre du fer qui rouille, les futures piles à combustible et la couche d’ozone qui disparaît? Jusqu’à hier, une série d’obscures liaisons chimiques. Depuis aujourd’hui, le Prix Nobel de chimie.

Le travail de l’Allemand Gerhardt Ertl, n’a pas fait que conduire à une meilleure compréhension de la rouille et de l’ozone : il a littéralement fait comprendre ce qui se passe à la surface d'un corps solide. Il a du coup favorisé l’émergence d’un pan de recherche complet, appelé la chimie des surfaces, qui décrit la façon dont des atomes se comportent lorsqu’ils entrent en contact avec des surfaces solides.

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Et cette meilleure compréhension a ensuite eu un impact direct sur l’industrie : comprendre comment le monoxyde de carbone agit sur le platine a par exemple conduit à la création des pots d’échappement modernes. Quant aux hypothétiques futures piles à combustible, censées être les sources d’alimentation des voitures de l’avenir, leur développement reste lié à la création de catalyseurs plus efficaces, explique à l’Agence France-Presse John Foord, chimiste à l’Université Oxford.

En fait, c’est peut-être toute l’industrie chimique moderne qui aurait bien du mal à fonctionner sans ce mot-clef qu’est la catalyse. Un autre volet, appelé catalyse hétérogène, est derrière la synthèse de l’ammoniac (NH3), un composé qui se retrouve dans tous les engrais.

Quel rapport entre l’ammoniac et la chimie des surfaces solides, direz-vous? On utilise comme catalyseur un morceau de fer : à son contact, les molécules des deux gaz utilisés (deux atomes d’azote (le N dans NH3) et deux atomes d’hydrogène, ou H) se dissocient; les atomes se promènent au hasard sur la surface solide, se rencontrent et finissent par former un nouveau composé, NH3.

Et la couche d’ozone dans tout cela? Eh bien une partie du processus chimique de destruction de la couche se produit sur des solides : de minuscules cristaux de glace dans la stratosphère.

Gerhardt Ertl est le deuxième Allemand à décrocher un Nobel cette semaine —son compatriote Peter Grünberg a partagé mardi le Nobel de physique (voir ce texte). Le Prix Nobel de chimie, qui sera remis officiellement lors d’une cérémonie à Stockholm le 10 décembre, lui a été annoncé le jour même de son 71e anniversaire.

Né à Bad Cannstadt en 1936, il a décroché son doctorat en chimie physique en 1965. C’est dès cette époque qu’il s’est passionné pour la chimie des surfaces, devenant « un des premiers à voir le potentiel de ces nouvelles techniques », écrit l’Académie suédoise des sciences, responsable de l’attribution du Nobel. « Étape par étape, il a créé une méthodologie pour la chimie des surfaces en démontrant comment diverses procédures expérimentales peuvent être utilisées pour fournir une image complète d’une réaction ». Il est professeur émérite (aujourd’hui retraité) à l’Institut Fritz-Haber, attaché à la Société Max-Planck de Berlin.

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