La conscience blessée de l’infirmière
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Professeure adjointe à la faculté des sciences infirmières de l’Université de Montréal et panéliste invitée à cette discussion, Marie Alderson mène, depuis 10 ans, des recherches visant à étayer les liens entre l’organisation du travail des infirmières et leur santé mentale. « Ce que je constate un peu partout, dit-elle, c’est que présentement les sources de plaisir professionnel se tarissent tandis que celles de la souffrance se multiplient. »
Elle note que la charge de travail est de loin la doléance principale de ces travailleuses. « Mais leur souffrance est bien plus subtile, reprend la chercheuse. Cela se manifeste à l’intérieur d’elles par le sentiment d’effectuer un travail bâclé. Elles disent : ‘Je me sens très loin du genre d’infirmière que je voulais être.’ L’écart qui naît entre leur idéal professionnel et les conditions de travail difficiles, qui les obligent tôt ou tard à diminuer leur niveau d’exigence, les atteint de plein fouet dans quelque chose de très intime : leur conscience d’infirmière. » D’où une multiplication de cas de fatigue et de « burn-out ».
S’inspirant d’une approche psychodynamique du travail, Marie Alderson a rencontré de nombreuses équipes d’infirmières afin de leur faire verbaliser les difficultés qu’elles vivent au travail. « Une fois les choses dites et identifiées, mon rôle a été d’habiliter les groupes d’infirmières à produire ensemble une demande collective de changement destinée à leurs supérieurs – car dans des problématiques semblables, il n’y rien de pire que l’isolement ou l’atomisation. Les demandes pouvaient prendre la forme suivante : ‘Dans l’organisation du travail actuellement, il y a telle ou telle chose qui nous blesse ; que pourrions-nous faire au quotidien pour alléger cette souffrance ? »
« Et si on répondait à cette question par une autre », ont lancé quelques personnes dans la salle : « à quand l’énoncé d’une éthique des politiques de santé qui éliminerait de telles situations ? » »