En 2004, la Russie signait le Protocole de Kyoto, permettant l’entrée en vigueur de ce traité international. Cela paraît très loin, n’est-ce pas? Surtout quand on pense qu’en 2005, Kyoto fut rescapé par la peau des dents lors de la Conférence des Nations Unies tenue à Montréal... et qu’aujourd’hui, on ne sait toujours pas ce à quoi un « Kyoto 2 » ressemblera, en 2012...

Année après année, depuis le début du 21e siècle, les écologistes détournaient les yeux des chiffres alarmants :

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- alors que le Protocole de Kyoto vise une réduction de 5% des gaz à effet de serre par rapport à leur niveau de 1990 - en 2005, les gaz à effet de serre avaient augmenté de 10%! - et au Canada, de 20%!

Certes, des pays s’en sortaient mieux, voire très bien : la Grande-Bretagne et plusieurs de ces voisins d'Europe. Mais en l’absence des États-Unis —qui ne l’ont toujours pas ratifié— de la Chine et de l’Inde —qui en avaient été exclus dans les années 1990 à titre de pays en voie de développement— il devenait de plus en plus clair que Kyoto n’était qu’un premier pas. Un tout petit premier pas. Un infime premier pas.

D’où la question qui commença à circuler : et s’ils abandonnaient Kyoto? En faveur d’un autre, plus mou, mais plus satisfaisant pour la Chine, l’Inde et les États Unis? Et s’il était déjà trop tard? Est-ce que Kyoto, c’est fini? demandions-nous lors de la Conférence de Montréal.

Le traité « anti-Kyoto » parut un temps accréditer ce scénario : en 2005, cinq pays, dont les États-Unis, signaient une entente (Partenariat Asie-Pacifique sur le développement propre et le climat) sur les gaz à effet de serre. Un traité immédiatement qualifié d’anti-Kyoto, de bâton dans les roues au processus international, parce qu’il ne mettait l’accent que sur des mesures volontaires.

On n’en a plus beaucoup entendu parler depuis. Et l’élection de Barack Obama risque de reléguer le traité anti-Kyoto dans les limbes. N’empêche que 2012, c’est après-demain, et qu’on voit mal comment les objectifs pourraient être atteints.

Ce n’est pas pour rien que les deux candidats aux présidentielles américaines, s’ajustant déjà aux scénarios de l’après-Kyoto, mentionnaient des objectifs pour les années 2020 et même 2050 : on en est là. Depuis 1990, les scénarios d’avenir se sont précisés, et ils ne sont pas rassurants : une réduction de 5% par rapport aux niveaux de 1990 pourrait être insuffisante pour empêcher un emballement du climat.

Qu’entend-on par emballement du climat? C’est une histoire de parties par million, ou PPM. Combien de parties par million de CO2 dans l’atmosphère faut-il pour ajouter un dixième de degré Celsius? Et combien de dixièmes de degré Celsius faut-il pour que la machine climatique ne dérape? Personne ne le sait avec précision. Jusqu’à la révolution industrielle, il y a 200 ans, le niveau de CO2 était toujours demeuré, pendant les 10 000 dernières années, aux environs de 275 PPM. On est aujourd’hui à 385. Les climatologues des années 1990 estimaient que la barre des 550 serait la ligne rouge à ne pas franchir. Plus récemment, d’autres ont conclu que la planète se déréglerait plus vite que prévu, et que la limite infernale serait plutôt 450. (lire La mince ligne rouge)

Cette notion de PPM n’est pas encore passée dans la culture populaire. Le « pourcentage des gaz à effet de serre » reste un concept moins nébuleux que les « parties par million ». Mais « parties par million » deviendra peut-être le mot-clef des années 2010 : soit parce qu’on s’approchera du chiffre fatidique, soit parce qu’on apprendra, un jour, qu’on l’a dépassé, pour le plus grand malheur de la prochaine génération...

Pascal Lapointe

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