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Lorsqu’un papa et une maman se rencontrent, les gènes ne sont pas toujours recopiés fidèlement : des erreurs peuvent se glisser, qui engendrent des mutations. Pendant notre vie aussi, des erreurs se glissent, mais celles-là sont aussitôt corrigées. Du moins, c’est ce qu’on croyait.

Une équipe de généticiens vient d’annoncer avoir trouvé plus de 10 000 cas, éparpillés sur un tiers de notre génome, où les séquences de deux molécules-clefs ne correspondent pas. Deux molécules qui sont au coeur de ce qui nous définit comme être vivant : l’ADN et l’ARN.

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Explication. Notre bagage génétique est une suite ininterrompue de quatre lettres (A, C, G et T) dans des combinaisons variées. On compte trois milliards de ces lettres, mises bout à bout : cela donne 25 000 gènes, et le tout s’appelle l’ADN. Une gigantesque molécule, en forme de double hélice, qui contient toutes les instructions dont notre corps a besoin pour bien fonctionner.

Comme l’ADN est présent dans chacune de nos cellules, chaque fois qu’une de nos cellules se divise, il faut donc s’assurer que l’ADN soit fidèlement recopié. C’est là le rôle d’une autre molécule, l’ARN. C’est ainsi que les biologistes ont coutume de dire que l’un de leurs « dogmes » est que l’information présente dans l’ADN est transférée à l’ARN, et de là aux protéines qui nous sont indispensables.

Avec la quantité astronomique d’informations à copier et recopier et re-recopier, les généticiens ont admis depuis longtemps qu’il était inévitable que des « erreurs typographiques » apparaissent ici et là. On croyait que les mécanismes ADN-ARN avaient pour rôle de corriger ces erreurs au fur et à mesure. Mais ce qu’annoncent, à l'étonnement général, Mingyao Li et Isabel Wang, de l’École de médecine de l’Université de Pennsylvanie, dans la dernière édition de Science, c’est que ces 10 000 erreurs ne sont pas de simples « fautes de frappe » : chacune apparaît chez au moins deux personnes, et 80% de ces « erreurs » de transcription sont présentes dans la moitié des 27 personnes étudiées. On les trouve aussi dans toutes sortes de cellules —globules blancs, neurones, peau, cellules souches, cancers.

Ce que cela signifie? Que ces « erreurs » n'en sont pas. Elles ont certainement une raison d’être. On ignore quelle est cette raison, d’où l’émoi qui secoue en ce moment les généticiens.

Quelques-uns s’empressent déjà de proposer, dans un langage lui-même difficile à décoder, des explications alternatives, autrement dit des détours qui pourraient expliquer comment Li et Wang auraient pu avoir mal interprété leurs données.

Mais si Li et Wang ont raison, cela signifie un énorme travail en vue pour comprendre à quoi servent ces « erreurs » —affectent-elles notre développement, notre apparence physique, entraînent-elles une maladie ou la combattent-elles? Et comment sont produites ces modifications : d’où provient le signal comme quoi telle lettre doit être introduite à la place de telle autre dans telle séquence et à tel moment de notre vie?

Si vous pensiez que le travail approchait de sa fin avec le séquençage du génome humain, pensez-y à deux fois...

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