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La peste noire était bien la peste noire. Il aura fallu 650 ans pour s’en assurer? Blâmez la génétique.

Certains historiens sont sans doute surpris d’apprendre que, dans les cercles scientifiques, il subsistait un doute quant à la responsabilité de l’épidémie qui a tué des dizaines de millions de personnes en Europe dans les années 1347-1350. S’agissait-il vraiment de la même bactérie Yersinia pestis, connue aujourd’hui encore puisqu’il arrive à la peste de resurgir ici et là? (on possède aujourd’hui des traitements).

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Dès 2000, une équipe dirigée par le généticien français Didier Raoult avait cru mettre fin au débat en séquençant l’ADN trouvé dans les dents de trois victimes de la peste noire. C’était bien la bactérie Yersinia pestis. «Nous croyons que cela met fin à la controverse», écrivaient-ils.

Apparemment pas, puisqu’une autre équipe, germano-américaine celle-là, a dû extraire 99 dents de victimes anglaises de la peste pour se livrer au même exercice génétique. Ils y ont trouvé l’ADN de la bactérie dans 20 cas et assurent avoir pris toutes les mesures nécessaires pour éviter que ces gènes n’aient été contaminés par de l’ADN moderne.

Ils tendent également à confirmer d’autres résultats, selon lesquels cette souche de la bactérie est différente de celle qui existe aujourd’hui.

C’est en 1894 que la bactérie Yersinia pestis a été identifiée comme étant la cause d’une épidémie de peste qui avait sévi quelques années plus tôt en Chine. Son découvreur, Alexandre Yersin, lui a laissé son nom et on n’avait alors aucune raison de douter qu’il s’agissait de la même peste noire qui avait frappé l’Europe en l’an 541, puis en 1347, et l’Asie à de nombreuses reprises.

Pourtant, au tournant des années 1980, des bactériologistes ont commencé à remettre cette idée en question, alléguant que le taux de mortalité de l’épisode du 14e siècle ne collait pas à ce qu’on avait appris, depuis, sur le développement de la maladie. Et s’il s’était plutôt agi d’un virus du type Ebola? Ou d’une infection aujourd’hui disparue? C’est ainsi que, dans les années 2000, les avancées de la génétique ont permis à différentes équipes d’exhumer des victimes, à la recherche de traces de leur tueur.

Les derniers en lice, Verena Schuenemann, de l’Université de Tubingen (Allemagne) et Kirsten Bos, de l’Université McMaster (Ontario) n’ont donc pas seulement confirmé le génome de Y. pestis —et contre-vérifié par un laboratoire indépendant— mais ont pu pointer deux mutations par rapport à ses cousins modernes. Pourraient-elles expliquer la virulence de la catastrophe des années 1340? C’est impossible de le savoir maintenant, mais ça ferait un paragraphe à ajouter aux livres d’histoire... et un avertissement.

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