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À l’automne 2005, les banlieues françaises s’enflamment sous l’impulsion d’une jeunesse démunie, les voitures brûlent. Loin de la folie médiatique, l’Association Paris-Montagne ose pourtant rêver: et si la culture scientifique débarquait dans les milieux défavorisés? Lancé en 2007, son programme Science Académie relève ce défi en ouvrant à ces lycéens les portes d‘instituts de recherche renommés.

Un premier accès aux sciences par un stage d’une semaine, une immersion complète et gratuite dans le milieu scientifique pendant les vacances scolaires. Ici, la démarche est individuelle: les futurs stagiaires, âgés de 15 à 17 ans, s’inscrivent par le biais du site Web de l’association en déclinant motivations et domaine choisi pour leurs stages.

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L’envie de découvrir est là, la vocation de la recherche peut-être aussi. «L’association se charge de sélectionner les candidats sur des critères sociaux et non sur leurs résultats scolaires. Si on retrouve en moyenne 17% de boursiers au niveau des lycées, notre programme Science Académie, lui, en accueille 38%. Une manière d’instiller la graine scientifique dans des milieux sociaux souvent peu exposés», explique Maëlle Lenoir, directrice de l’Association Paris-Montagne.

Et, depuis 6 ans, le succès du programme ne se dément pas : 400 demandes par an sur toute la France, toutes comblées! Au jeu du stage, les filles tirent leur épingle du jeu et courent la chance de rencontrer un modèle féminin. À elles seules, elles représentent les deux tiers des promotions en moyenne. L’inverse de ce qui est constaté dans les filières scientifiques.

Lutter contre l’autocensure

D’illustres centres de recherches, de grandes écoles d’ingénieur et d’autres universités réputées proposent aux stagiaires d’être en prise directe avec la science par le biais d’un mentorat. Qu’il soit doctorant, post-doctorant ou chercheur confirmé, le mentor scientifique accueille le lycéen dans son laboratoire. Mais pas de n’importe quelle manière.

L’Association Paris-Montagne s’assure de former les chercheurs à la médiation scientifique et de préparer le stage en amont pour apaiser les appréhensions de chaque côté.

«On demande aussi aux accompagnateurs de consacrer du temps pour expliquer aux lycéens leur parcours personnel», précise Mme Lenoir. Une «pause inspiration» capitale qui permet au stagiaire de réaliser que le chercheur est comme lui. Voilà de quoi dépoussiérer l’image-cliché du chercheur blanc et barbu. «Soudainement, le monde scientifique ne leur apparaît plus comme inaccessible. Bien au contraire» ajoute-t-elle.

Grâce à cette expérience unique, les stagiaires prennent confiance en leurs capacités. Plus motivés, ils visent des études scientifiques plus longues que prévu. Près de 80% des stagiaires suivront d’ailleurs des cursus scientifiques à la sortie du lycée. Beaucoup envisageront de devenir médecins, un métier aux accents de prestige dans toutes les cultures.

Favoriser la mixité sociale et la citoyenneté

Lors des stages, les jeunes ont l’occasion de se confronter à tous les visages du travail en laboratoire, ces 1001 métiers souvent inconnus du grand public. Le stagiaire y découvre que le milieu de la recherche a des accents internationaux, une vision qui lui permet d’intégrer que la différence culturelle est valorisée. Ce brassage des horizons sociaux reflète une image positive de l’immigration dont plusieurs jeunes sont issus.

«Pour les chercheurs aussi, les retombées sont positives, explique Maëlle Lenoir. De jeunes yeux qui pétillent à la simple évocation de leurs projets, quoi de mieux pour relancer un chercheur. Ils assistent à un réenchantement de leurs recherches.»

Mais au-delà de la confirmation de vocation scientifique, Science Académie propose de partager des valeurs communes. Entre chercheurs et stagiaires. Entre citoyens d’aujourd’hui et citoyens de demain. Esprit critique, rationalisme, travail d’équipe… Voilà quelques-unes des valeurs scientifiques utiles dans le bagage d’un citoyen désireux de décoder les enjeux de nos sociétés. La science n’est qu’une manière de s’engager dans la citoyenneté, Science Académie, un vecteur.

Toujours plus de médiation scientifique

Loin de l’école et de ses modèles pédagogiques, la science s’incarne au quotidien pour ces jeunes. Avec le congrès prévu chaque mois de mai, les stagiaires restituent leurs travaux et expériences scientifiques comme leurs ainés : affiches et présentations orales de circonstance. Un moment privilégié d’échange et de partage avec la famille, les amis et la communauté scientifique, l’occasion aussi de nouer ou de renforcer ses contacts.

Et, pour infuser la culture scientifique dans les veines de la jeunesse, l’Association Paris-Montagne ne lésine pas sur les autres activités proposées. «Des semaines thématiques comme celle de mars 2013 mariant “Mémoire et fonctionnement cérébral” ou l’université d’été proposée en juillet à 25 “science académiciens” assidus. Dans ce cas, on leur offre une formation en médiation scientifique afin qu’ils animent un kiosque destiné aux enfants lors du festival scientifique organisé par l’association. Il y a une belle réception de la part de ce jeune public (8-12 ans) issu des centres de loisirs», indique Maëlle Lenoir.

Et au chapitre du décloisonnement de la science, les sciences académiciens sont exemplaires. Depuis septembre dernier, un premier doctorant qui a suivi le programme Science Académie accueillera ses premiers lycéens dans son laboratoire. Une occasion unique de tisser des liens serrés entre recherche et société et de peindre une image moins caricaturale de la science.

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