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Les pelouses du Capitole de l’État se déclinent dans des teintes de brun insoupçonnées. Le vert a depuis longtemps fait ses valises. Depuis que l’eau manque. À tel point que les restaurants ne servent le précieux liquide que sur demande.

Les agriculteurs, eux, ne pleurent plus que pour arroser leurs cultures encore debout. La sécheresse frappe dur en Californie et dévoile une gestion de l’eau héritée d’un autre siècle.

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Des épisodes de sécheresse, l’État le plus peuplé des États-Unis (38 millions de personnes) en a connu. Sauf qu’au printemps, le Golden State subissait sa plus sèche période de 3 ans depuis 1895, selon la National Oceanic and Atmospheric Administration. 80% de son territoire est déjà atteint de sécheresse extrême ou exceptionnelle d’après les données cartographiques de l’United States Drought Monitor.

En avril, cette situation extraordinaire a forcé le gouverneur démocrate Jerry Brown a déclaré l’état d’urgence pour une deuxième fois en trois mois. Objectif? Réduction volontaire de la consommation d’eau de 20%. Vain: la consommation a même pris du «gallon» (+1%) en mai. Désormais, les gaspilleurs invétérés seront amendés à hauteur de 500$ par jour. Et, pour lancer la croisade «Économisons l’eau», Lady Gaga elle-même s’est fendue d’un message YouTube.

Une agriculture assoiffée

Les fermiers californiens, qui drainent 80% de l’eau utilisée en Californie, font les frais de l’interminable vague de chaleur. Selon l’UC Davis Center for Watershed Sciences, rien que les agriculteurs de la Central Valley, la région la plus touchée, perdront 810 millions de dollars à laisser leurs terres en jachère et débourseront plus de 450 millions pour pomper l’or bleu. Sans compter les 17 000 emplois agricoles qui s’évaporeront sous l’effet de la sécheresse

Les prix des fruits et légumes pourraient s’envoler vers des sommets, puisque la Californie produit 60% des fruits et des noix du pays et 51% de ses légumes.

Une gestion des eaux calamiteuse

75% des Californiens comptent en partie sur les eaux souterraines pour alimenter leurs besoins en eau potable. Selon la California Water Foundation, les eaux souterraines représentent jusqu’à 40% de l’eau utilisée en temps normal et 60% en période de sécheresse. Pourtant, la Californie manque cruellement d’un plan de gestion global des eaux souterraines contrairement à tous les États voisins. Cela devrait changer puisque deux projets de loi seront prochainement examinés pour enligner l’État vers une gestion locale de ses eaux.

Quant à l’eau de surface, provenant majoritairement de la fonte des neiges de la Sierra Nevada, elle est distribuée aux agriculteurs de façon archaïque et inégale à partir d’un système de water rights, hérité de la conquête de l'Ouest au 19e siècle. Les premiers pionniers arrivés sur une parcelle avaient un accès prioritaire et gratuit aux eaux de la rivière qui passaient au travers. Ces privilèges continuent leur vie au travers des détenteurs de droits.

Selon des données compilées par l’Associated Press, près de 4000 entreprises, villes, exploitations agricoles et particuliers détiennent la moitié de ces droits et se la coulent douce. Même en période de sécheresse, elles peuvent consommer l’eau gratuitement et sans contrôle. Un contrôle difficile puisque la consommation est autodéclarée et les données collectées une fois tous les trois ans par l’État.

En attendant l’arrivée d’El Nino et ses précipitations —modérées et insuffisantes pour pallier la sécheresse—, les Californiens et le gouverneur Jerry Brown se prennent à rêver de pipelines souterrains capables de transporter l’eau du nord au sud. Encore faut-il qu’il reste quelque chose à transporter, les prochaines années annoncent encore des sécheresses extrêmes.

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