screen_shot_2015-07-07_at_5.22.25_pm.png
La fraude scientifique a un prix. Dong-Pyou Han le sait. Le 1er juillet dernier, cet ex-chercheur de l’Université de l'Iowa a écopé de 57 mois de prison ferme pour avoir fabriqué et falsifié des données expérimentales portant sur des vaccins contre le sida. Une condamnation d'une ampleur inégalée pour ce type d’escroquerie.

L’histoire débute en octobre 2013. L’Université de l'Iowa (ISU) conclut que M. Han, membre de l'équipe menée par le professeur Michael Cho, a contrefait des résultats d’expériences financées par les Instituts américains de la santé (NIH).

Abonnez-vous à notre infolettre!

Pour ne rien rater de l'actualité scientifique et tout savoir sur nos efforts pour lutter contre les fausses nouvelles et la désinformation!

Pendant quatre ans, il a ajouté des anticorps humains dans des échantillons de sang de lapins traités avec un vaccin antisida expérimental. Les autres membres de l’équipe scientifique dont il faisait partie ont cru à tort que les animaux avaient développé une immunité contre le virus!

Grâce à ces résultats (frauduleux) si prometteurs, M. Han, ses collègues et l’ISU ont obtenu 19 millions de dollars américains en subventions, notamment de la part des NIH et de l'Institut national des allergies et des maladies infectieuses (NIAID).

L’homme avoue sa responsabilité, démissionne et est déclaré inéligible à des fonds publics pendant 3 ans par le Bureau de l'intégrité de la recherche (ORI), l’organisme qui enquête sur les cas d’inconduites impliquant des fonds des NIH.

L’affaire aurait pu en rester là si Charles E. Grassley, un sénateur républicain de l’Iowa, ne s’en était pas mêlé. Connu pour ses positions sur la transparence de l’utilisation des fonds publics, il a porté l’affaire en cour.

Le 1er juillet, le tribunal fédéral de l’Iowa a condamné Dong-Pyou Han à 57 mois de prison, au remboursement de 7,2 millions de dollars américains au NIH et à trois ans de liberté surveillée après sa sortie de prison. Le juge fédéral évoque même la possibilité que Dong-Pyou Han, originaire de Corée du Sud, soit renvoyé dans son pays. De son côté, l’ISU devra rendre 496 000 dollars américains au gouvernement fédéral et se voit amputer de 1,4 million en bourses (non payées encore).

La peur par l’exemple?

Selon le blogue La science au XXIe siècle , hébergé sur le site Web de Courrier International, la question reste ouverte: «Immigré sud-coréen et pas au sommet de la hiérarchie universitaire, Dong-Pyou Han a-t-il été une “cible idéale pour faire l’exemple”?»

S’il est vrai que Han a floué ses collègues, son employeur et des organismes financés par des fonds publics sur le fait que le vaccin expérimental ne fonctionnait pas, on peut se demander si sa peine d’emprisonnement envoie aux fraudeurs potentiels le message escompté par la procureure fédérale adjointe, à savoir: «Que vous ayez un doctorat ou non, vous serez tenus responsables de vos actes.»

Pour David Wright, ex-directeur de l’ORI, le bénéfice d’une telle poursuite pénale est discutable. Selon lui, bannir un chercheur d’accéder à des bourses ou des subventions gouvernementales est déjà une sentence de mort professionnelle en soit. Un article de Nature rappelle aussi que le pouvoir d’enquête d’organismes publics de financement de la recherche comme les NIH reste structurellement très limité, leur pouvoir de sanction aussi.

En attendant de faire mieux, les chercheurs-escrocs sont prévenus!

Je donne