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Alors qu’on parle d’ère post-factuelle, les scientifiques auraient tort d’observer ce problème de trop loin. La remise en question du « fait » et la méfiance du public envers les élites, concernent au premier chef la science et les chercheurs.

Et il y a des leçons que les chercheurs pourraient apprendre des journalistes scientifiques, écrit l’auteure et productrice de films en santé Anita Makri, dans un texte publié par la revue scientifique Nature.

Les deux industries pour lesquelles je travaille — la science et le journalisme — sont préoccupées par la vérité mais seul le journalisme est sérieusement impliqué dans une recherche de solutions. Les scientifiques ont un retard à rattraper, sans quoi ils risquent d’être marginalisés encore plus, dans une société qui, de plus en plus, se passe d’eux pour soupeser la preuve et prendre des décisions.

Un des problèmes, poursuit-elle : là où les journalistes jugent normal de débattre des faits et de dénoncer les fausses nouvelles, « les scientifiques se voient comme des victimes ». Ils doivent donc apprendre à devenir plus actifs — ne serait-ce que pour rejoindre la portion du public pour qui la science a perdu cette pertinence qu’elle avait pour distinguer le vrai du faux.

Pour regagner cette pertinence, scientifiques, communicateurs, institutions et organismes subventionnaires doivent travailler afin de changer la façon dont une science socialement pertinente est présentée au public. Ce n’est pas une question de formation aux médias pour les chercheurs: il s’agit plutôt de repenser le type de science que nous voulons communiquer à un public plus large.

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Dans le passé, la vulgarisation a longtemps eu des objectifs plus limités qu’aujourd’hui — transmettre le côté merveilleux de la science, par exemple — accentuant du coup cette image du scientifique en position d’autorité : le Savant, le Sage, celui qui sait quelque chose que le commun des mortels ignore. Or, il faut aujourd’hui ajuster le tir : oui, l’expert peut se tromper; oui, la science est faite d’incertitudes; mais toutes les erreurs ne sont pas d’égale valeur, et il existe des choses qu’on peut appeler des faits, et d’autres des opinions.

Équiper le citoyen d’outils permettant de mieux comprendre comment la science se construit rendrait ce citoyen moins perméable aux fausses nouvelles, conclut Anita Makri, en s’inscrivant dans une réflexion qui, là aussi, est plus avancée dans le milieu journalistique — le Détecteur de rumeurs en est un exemple — que dans la communauté scientifique.

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