Elysee

Sur les enjeux scientifiques, les deux candidats à l'élection présidentielle française sont sur la même longueur d'onde quant aux OGM et aux gaz de schiste. Macron est plus ferme sur la réduction des gaz à effet de serre, mais Le Pen promet un fort investissement dans les énergies renouvelables... sauf l'éolien qu’elle qualifie de « vraie pollution ».

Ce sont quelques-uns des points qui se dégagent des questions de nature scientifiques auxquelles ils ont été soumis ces derniers mois, avec toutefois de gros trous : ce printemps, Marine Le Pen  a été la seule absente notable des huit candidats qui ont répondu au questionnaire envoyé par une centaine de chercheurs. Ni Macron ni Le Pen n'ont répondu à celui de l'Association des journalistes de la presse scientifique. Et en mars, Emmanuel Macron a été le seul à faire la Une du magazine Sciences et avenir.

Mais entre leurs programmes et les entrevues accordées ici et là, se dégagent tout de même des tendances lourdes, en particulier autour de l'environnement.

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Environnement et biodiversité

L'ingénieur Thibault Laconde, sur son blogue Énergie et développement, n'accorde pas la note de passage à Marine Le Pen (7,2 sur 20), mais Emmanuel Macron ne s'en sort pas très honorablement (12,2 sur 20 : « peut mieux faire »).

À l'heure actuelle, aucun des deux programmes ne peut être considéré comme satisfaisant. Même si celui d'Emmanuel Macron est légèrement plus complet, il me semble indispensable que les équipes des deux candidats s'attellent à ces sujets avec plus de sérieux.

Cependant, il n'est pas possible de mettre les deux programmes sur le même plan. On voit chez Marine Le Pen une nette tendance au négationnisme climatique alors que ses déclarations — et ses revirements — sur le prix de l'énergie, les éoliennes ou le stockage des déchets radioactifs, révèlent une dérive clientéliste. En matière d'énergie, le Front National ne semble pas avoir de vision, mais essayer de satisfaire ses interlocuteurs quitte à se contredire régulièrement. Dans la situation où nous nous trouvons actuellement, c'est la recette du désastre.

 

Le quotidien Le Monde est tout aussi critique, notant que « le programme environnemental de Mme Le Pen est quant à lui plutôt concentré sur les questions de défense des droits des animaux et une défense de la production locale. »

On note par ailleurs que le mot « biodiversité » n’apparaît nulle part dans le programme du Front national. Pas plus que la lutte aux changements climatiques.

Climat et énergie

Paradoxalement, souligne le magazine environnemental Reporterre, si le groupe parlementaire dont Marine Le Pen est co-présidente au Parlement européen a voté contre l'Accord de Paris sur le climat, en revanche, la candidate a pointé le 26 janvier les « menaces (...) que font peser le dérèglement du climat, la pollution de l’air, de l’eau et des terres, le pillage de la diversité et la grande extinction des espèces ».

Elle s’est également engagée à maintenir le moratoire de 2011 sur l’exploitation de gaz de schiste en France. On est loin, poursuit Reporterre, des déclarations du père qui, en 2010, dénonçait « l’écologisme, nouvelle religion des bobos gogos », lors d’un colloque au titre limpide, « Réchauffement climatique, mythe ou réalité ».

Marine Le Pen a été la seule des quatre principaux candidats à ne pas se prononcer pour la fermeture des dernières centrales au charbon. En revanche, elle s’engage à « développer massivement les filières françaises des énergies renouvelables ». Sauf l’éolien, sur lequel elle demande un moratoire. « C’est épouvantable, c’est cher, c’est une vraie pollution non seulement visuelle, mais je pense que nous découvrirons plus tard les conséquences des éoliennes sur la santé des habitants », expliquait-elle le 23 mars.

Macron propose de son côté de doubler d’ici 2022 la production éolienne et solaire, et avance une cible d’élimination des énergies fossiles pour 2050.

Enfin, sur le nucléaire, ni Macron ni Le Pen ne proposent d’en sortir. Macron s’engage toutefois à réduire à 50 % (contre 75 % aujourd’hui) la proportion du nucléaire dans la production d’électricité d’ici 2025.

Il est irréaliste, a déclaré Le Pen au magazine Actu Environnement, « de réduire simultanément l'usage du nucléaire et des énergies fossiles. L'élimination des fossiles doit être la priorité. »

OGM et agriculture

Sur les organismes génétiquement modifiés, aucun des deux candidats ne propose un bouleversement de l’ordre établi : Le Pen est contre « en l’état actuel des choses » et Macron promet de maintenir « une interdiction ferme des cultures d’OGM en plein champ », ce qui est déjà le cas en France. Tous deux promettent d’investir dans la recherche : « nous développerons les alternatives pour l’alimentation animale », a répondu Macron au questionnaire des 100 chercheurs. Le Pen se dit contre « les pesticides et les perturbateurs endocriniens », Macron dit vouloir « placer la France en tête du combat contre les perturbateurs endocriniens et les pesticides ».

Reporterre, qui s’est livré à une comparaison des programmes du Front National de 2012 et maintenant, remarque que « le virage écolo n’est pas notable », mais que « plusieurs propositions ont de quoi plaire aux défenseurs d’une agriculture plus écologique ».

Union européenne et recherche

Le Brexit pourrait-il être un enjeu susceptible de mobiliser les défenseurs du financement de la recherche ? Dans une lettre publiée le 20 avril dans Le Monde, neuf chercheurs s’inquiétaient, pour cette raison, du programme de Marine Le Pen :

En stigmatisant l'Union européenne comme elle le fait, en appelant à un repli national, elle contribuerait à couper la France de ses partenaires étrangers, alors que la recherche est une activité fondamentalement internationale.

Quant à Emmanuel Macron, c’est lui qui s’était signalé en février par une vidéo devenue virale où, dans la foulée de l’élection de Trump, il s’adressait en anglais aux chercheurs américains, les invitant à venir s’installer en France.

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