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Ces dernières années, les cartes de la planète qui montrent des records de chaleur — en rouge — éparpillés aux quatre coins du monde ont aussi montré qu’une des rares exceptions est située dans l’Atlantique Nord : une région — en bleu — plus froide que la normale. Coïncidence ou signal que quelque chose ne tourne pas rond dans le « tapis roulant océanique » ?

Ce tapis roulant, ou, pour les initiés, AMOC (Atlantic meridional overturning circulation) est ce qui apporte à l’Europe les eaux plus chaudes du Gulf Stream et au Labrador les eaux plus froides du Groenland. À l'échelle planétaire, on parle de circulation thermohaline. Cette boucle est le résultat du mélange entre l’eau et le sel : plus l’eau est chaude et s’évapore, plus elle devient salée, et le « tapis roulant » descend dans les profondeurs de l’océan. À mesure que l’eau redevient moins dense, donc moins salée, il remonte.

Or, comme ces allers et retours sont aussi influencés par la température de l’air, que se passerait-il si un changement trop abrupt bouleversait le cycle ? La question est posée depuis les années 1960 et les variations de température de l’AMOC sont observées avec attention depuis les années 2000. Le film-catastrophe The Day After Tomorrow, en 2004, imaginait qu’une ère glaciaire pouvait nous tomber dessus en 20 minutes si l’AMOC s’arrêtait — un scénario évidemment exagéré, mais qui traduit tout de même l’importance de cette « boucle » de l’Atlantique dans les interactions climatiques du reste de la planète. Ainsi, depuis 2015, l’apparition de cette « tache bleue » plus froide, qui signifie un affaiblissement de la boucle océanique, semble pouvoir être associée à une série de canicules en Europe. Plus largement, les océanographes qui se sont penchés sur les variations historiques de la boucle océanique ont commencé à dire que de telles canicules en Europe auraient été plus fréquentes pendant les périodes où la « tache froide » était plus intense. Et il se trouve que les années « plus intenses » sont particulièrement nombreuses depuis 1970, selon une étude récente de l’Université d’État de Pennsylvanie.

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Par ailleurs, selon une étude allemande parue plus tôt cette année, les eaux au sud du Groenland étaient anormalement chaudes et faibles en sel entre 2002 et 2014 — deux facteurs identifiés depuis longtemps par les océanographes comme étant le prélude à un affaiblissement de l’AMOC.

S’il devait se confirmer que l’AMOC est vraiment en train de s’affaiblir, comment saurons-nous à l’avance s’il s’agit d’un affaiblissement cyclique ou d’un effondrement, comme celui qui a conduit à une ère glaciaire il y a 110 000 ans ? Aucun expert ne peut répondre à cette question avec les données dont on dispose, mais une chose est sûre : ne comptez pas trop sur une ère glaciaire pour compenser le réchauffement planétaire en cours. Tout refroidissement ne serait que « régional » — l’Europe, par exemple, si elle perdait les effets du Gulf Streamparce que la chaleur accumulée devrait bien aller quelque part.

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