Un siècle de bioterrorisme
(ASP) - On avait pourtant eu bien du temps
pour sy préparer, à ce "terrorisme
biologique" ou "bioterrorisme". Il
y a près dun siècle que des armées
occidentales, les premières, les ont mises
sur pied : les Allemands sen sont servis
au début de 1915, poussant les Britanniques et
les Français à les utiliser à leur
tour avant la fin de cette même année.
Les historiens estiment à 100 000 les soldats
tués par ces gaz (il y en a eu jusquà
17 sortes, ce qui témoigne dune recherche
scientifique aussi soutenue que désolante) et
jusquà un million de blessés.
Le Protocole de Genève, en 1925,
a rendu hors-la-loi lutilisation darmes
biologiques ou chimiques en temps de guerre, mais nest
jamais vraiment parvenu à empêcher leur
fabrication ni leur utilisation. Cest davantage
lexpérience traumatisante vécue
par les militaires eux-mêmes qui les a empêchés
de réutiliser ces produits lors de la Deuxième
guerre mondiale. Du moins, sur le champ de bataille:
les Nazis, eux, ne s'en sont pas privés dans
les camps de concentration...
Selon la Fédération américaine
des scientifiques, des armes chimiques auraient été
utilisées dans 11 affrontements depuis 1918,
généralement par des déversements
aériens. Les Japonais en ont utilisé en
Chine pendant la Deuxième guerre mondiale; les
Espagnols et les Italiens, en Afrique du Nord ;
les Britanniques, en Russie en 1919; et bien sûr,
les Américains, avec leur tristement célèbre
Agent Orange, pendant la guerre du Viet-Nam. On est
loin des fanatiques Talibans...
Les armes biologiques sont en théorie
bannies, en vertu dun autre traité, signé
en 1975. Les armes chimiques sont quant à elles
-toujours en théorie- bannies depuis janvier
1993, en vertu dun Protocole, quont signé
130 pays, qui interdit non seulement leur production
mais aussi leur entreposage.
Mais plus le temps passe, et moins ce
sont les États qui inquiètent : on
la vu avec la secte japonaise Aoum, qui a relâché
un gaz mortel, le sarin, dans le métro de Tokyo
en 1995, tuant 12 personnes et en blessant des milliers
en quelques minutes. On a soupçonné, dans
les années 80, une faction du groupe allemand
Armée rouge davoir développé
la toxine du botulisme : on en a en tout cas retrouvé
des traces en 1984 dans une maison de Paris, lors dune
saisie. Enfin, une secte religieuse américaine
a réussi à empoisonner les bars à
salade de 10 restaurants de lOregon avec de la
salmonelle, expédiant plus de 700 personnes à
lhôpital. Leur objectif était...
dinfluencer les résultats dune élection
locale.
Certes, développer une arme biologique
(par exemple, une super-bactérie contre laquelle
il ny aurait pas de parade) pose
dimmenses difficultés: il faut une
expertise biomédicale de pointe, un laboratoire
doté de beaucoup, beaucoup dargent et de
la toute dernière technologie. Un "savant
fou" ne peut pas créer cela tout seul dans
son garage. Et rien
ne garantit que le virus ou la bactérie se développera
comme on le souhaite.
Une arme chimique, en revanche, comme
le gaz sarin, présente moins dobstacles.
Lentreposer en toute sécurité en
pose davantage. Et la transporter, encore plus. Mais
avec des agents prêts à mourir pour leur
cause...