Gaz à effet de serre: l'étrange
compromis
(ASP) - Or donc, Kyoto est sauvé.
Ca y est. Après quatre ans et bien des tordages
de bras, les négociateurs ont accouché
dune entente qui, que les Etats-Unis le veuillent
ou non, brise
limpasse des discussions internationales sur le
réchauffement global.
Si cette entente est ratifiée par
55 pays industrialisés il y a encore des
obstacles à surmonter pour en arriver là-
le Protocole de Kyoto deviendra officiellement le premier
traité international à imposer des restrictions
à lusage de gaz à effet de serre.
Le président américain,
George Bush, avait rejeté ce traité en
mars dernier, répondant ainsi aux demandes de
son lobby de lindustrie. En labsence des
Etats-Unis, le Protocole était donc menacé
de mort, ce pays étant le plus gros producteur
de gaz à effet de serre. Plusieurs pays, dont
le Canada et le Japon, avaient alors fait part de leurs
réticences à poursuivre les négociations,
si le plus polluant dentre eux refusait dy
participer.
Mais après deux semaines de négociations
à Marrakech, au Maroc, tard vendredi soir, le
9 novembre, les pressions de lUnion européenne
-chef de file de ceux qui tenaient à la ratification
du Protocole- ont porté fruit. Bien quavec
des nuances: certes, les pays signataires seront tenus,
comme prévu, de réduire dici 2012
leurs émissions de gaz à effet de serre
de 5% par rapport au niveau atteint en 1990. Mais au
fil des quatre années de négociations,
le principe des "puits de carbone" a tant
et si bien cheminé quil en est venu à
réduire la portée de Kyoto. Un puits de
carbone, cest par exemple une forêt les
arbres absorbent le dioxyde de carbone- quil suffira
à un pays de planter pour remplacer tout ou partie
de ses réductions de gaz polluants.
A titre dexemple, la Russie a vu
les négociateurs accepter son calcul: puisque
ses vastes forêts absorberaient chaque année
17 millions de tonnes métriques de carbone, cela
lui évite davoir à réduire
dautant son utilisation de charbon et de pétrole.
Et comme ces "puits de carbone" peuvent donner
lieu à des "crédits" supplémentaires
lorsquun pays dépasse son "quota"
de réduction de gaz à effet de serre,
le Japon achètera, à un prix indéterminé,
ces "crédits" russes, lui évitant
à son tour dautres réductions de
ces gaz polluants.
Les écologistes pourront tout au
plus se réjouir que cette entente soit la toute
première à tenter de mettre au pas le
secteur industriel. Mais entre leurs espoirs tels quils
avaient été quantifiés il y a une
décennie, lors du Sommet de Rio en 1990,
doù la référence à
cette date lorsquon parle de réduction
des gaz à effet de serre- et lentente qui
vient dintervenir à Marrakech, il y a un
abîme.