La peste noire. La
mort noire. Celle qui a tué
pratiquement le tiers de la population
de lEurope, au cours des années
1347-1350. Une catastrophe sans
équivalent depuis.
Et une maladie qui
frappe encore dans plusieurs régions
dAsie, en dépit de
lexistence, depuis des décennies,
dantibiotiques tout ce quil
y a defficace. Au moins deux
mille morts par an, et la crainte
que ce chiffre naugmente,
avec la résistance croissante
aux antibiotiques de cette bactérie.
Car la peste noire,
cest une bactérie.
Transportée par des rongeurs,
elle peut sattaquer aux humains
avec une rapidité redoutable.
Comme toute bactérie, comme
tout être vivant, elle a donc
un code génétique,
un génome bien à elle.
Ce génome était depuis
des années sur la liste des
priorités des centres de
recherche en génétique
de la planète. Et
le but vient dêtre atteint:
des chercheurs viennent de publier
dans
la revue Nature la séquence
des 4,65 millions de paires de base
ou "lettres" formant le
génome de ce micro-organisme
qui fait si peur. Un décodage
qui fournit une assise plus solide
que jamais à la lutte contre
ce mal: on espère par exemple
pouvoir créer des antibiotiques
ou des vaccins plus efficaces, parce
quils cibleraient précisément
tel groupe de gènes de la
bactérie, dès lors
que lon saurait -mais on n'en
est pas encore là- que tels
et tels gènes sont responsables
de la multiplication de la bestiole;
ou de son adaptation aux êtres
humains, à leur sang et à
leurs intestins.
Et enfin, dans le
contexte
actuel après le
11 septembre-
une connaissance pointue du génome
du bacille de Yersin cest
son nom- fournit une arme pour lutter
contre déventuels mutants
de ce bacille qui auraient été
créés dans un laboratoire
à des fins terroristes. Des
défecteurs soviétiques
ont déjà affirmé
avoir contribué à
créé une souche résistante
aux antibiotiques de la bactérie
de la peste, une affirmation qui
demeure, aujourdhui encore,
controversée.
Mais il reste pour
tout cela du chemin à faire
-aussi bien pour les scientifiques
"légitimes" que
pour les terroristes- et bien dautres
connaissances à amasser sur
ce génome. A court terme,
résume Julian Parkhill, de
lInstitut Sanger à
Cambridge, Angleterre, qui a dirigé
ce projet de "séquençage",
ce que cela risque de nous apprendre,
cest, plus simplement, comment
évoluent les maladies infectieuses
telles que la peste. Déjà,
on sait quil y a 2000 ans,
le bacille était présent,
mais avait un impact beaucoup plus
bénin sur la santé
humaine. Ce qui sest passé
depuis 2000 ans chez lui, la façon
dont ses gènes se sont adaptés
aux nôtres, pourrait nous
en apprendre beaucoup sur ce qui
risque de se passer dans le futur,
chez cette bactérie et chez
beaucoup dautres...