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19 mars 2001



La mémoire qui oublie


Plusieurs doutent qu’il soit vraiment possible de réprimer un souvenir pénible : la théorie veut plutôt qu’un souvenir soit toujours là, quelque part au fond de nous, qu’on le veuille ou non. Eh bien, peut-être pas.


Peut-on réprimer un souvenir?
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C’est depuis Freud que rôde cette notion de souvenirs réprimés. C’est avec lui que les psychologues ont commencé à élaborer des théories autour de cette capacité qu’aurait chaque être humain, face à un événement traumatisant ou perturbant, "d’oublier" l’événement en question. De le "refouler" dans son inconscient. Et au cours des dernières décennies, la théorie est devenue tant et si bien acceptée qu’on l’a utilisée jusque devant les tribunaux, par exemple avec des victimes d’inceste qui ont prétendu, avec succès, avoir réprimé leurs souvenirs d’agressions pendant toute une vie -jusqu’à ce qu’ils resurgissent, de manière inattendue et incontrôlée.

Mais les sceptiques sont nombreux. Pour eux, on ne réprime pas vraiment un souvenir. On ne peut en aucun cas l’effacer. On se contente plutôt de l’enfouir, on s’empêche d’y penser, de sorte qu’on arrive, avec le temps, à cesser effectivement d’y penser, à cesser de le revoir surgir. Un souvenir, disent-ils, ne peut disparaître qu'à la suite d’un accident grave qui provoque des dommages au cerveau, ou à cause d’une grave maladie comme l’Alzheimer; mais la seule force de notre volonté ne peut en aucun cas l’effacer.

Vrai... et faux, viennent d’affirmer des chercheurs américains, dans le cadre d’une recherche qui a fait du bruit. "Nous pouvons contrôler la mémoire", ont titré plusieurs média,s à travers le monde. C’est un peu exagéré, mais somme toute, plus près de la vérité que la thèse des sceptiques: ce que concluent Michael Anderson et Collin Green, de l’Université de l’Oregon, dans la revue britannique Nature, c’est que bien que nous ne puissions pas "effacer" un souvenir, nous pouvons très efficacement le "bloquer" -si nous essayons très fort. Et mine de rien, arriver à cette conclusion était tout sauf évident -parce que comment voulez-vous mesurer ça en laboratoire, des souvenirs non-désirés ?

Leur recherche était loin de l’inceste et autres souvenirs traumatisants. Les deux chercheurs ont plus simplement demandé à des étudiants du collège de mémoriser des paires de mots afin que, lorsqu’on leur en montre un, ils se rappellent de l’autre. Une partie des étudiants a ensuite dû s’efforcer d’oublier le second mot, pendant que l’autre partie devait s’efforcer de penser à la paire de mots. Peu de temps après, les premiers avaient plus de mal que les seconds à se rappeler de cette paire de mots, même si on leur offrait de l’argent s’ils arrivaient à s’en rappeler.

On objectera qu’on est loin, très loin, du souvenir d’un événement traumatisant, et les deux chercheurs le reconnaissent eux-mêmes. Pourtant, écrivent Anderson et Green, la stratégie suivie par des enfants victimes d’agression pourrait être la même : s’efforcer de ne pas y penser, de sorte que l’événement finit par disparaître -mais attention, pas totalement disparu: juste enfoui, écrasé, refoulé à la frontière entre l’oubli et l’inconscient -de sorte qu’il pourrait effectivement revenir à la surface. Ce qui nous ramène sur le terrain des sceptiques.

L’étape suivante d’une telle recherche serait de voir combien de temps un tel "oubli" peut durer -donc, si un souvenir refoulé peut être "récupéré" après un certain temps. C’est l’objectif que ce sont fixés les chercheurs à court terme.

Il est possible, avancent-ils, que la répression d’un souvenir ne soit efficace "que si quelqu’un doive continuellement faire face à des rappels de son traumatism ; par exemple, si le vétéran du Vietnam devait vivre au Vietnam": en s’exerçant jour après jour à ne pas penser au traumatisme chaque fois qu’il croise quelque chose ou quelqu’un qui le lui rappelle, il finit par y arriver. Alors que celui ou celle qui n’a pas à faire face à son traumatisme quotidiennement -par exemple, la personne agressée par un étranger, plutôt que par un membre de la famille- aurait davantage de mal à oublier, puisqu’elle n’aurait pas la possibilité de "s’exercer".

Et cela, au passage, va à l’encontre de la sagesse populaire, puisque, pour revenir à l’exemple des victimes d’inceste, on aurait au contraire tendance à penser que celles qui vivent avec leur agresseur ont beaucoup plus de difficultés à oublier que celles qui ne rencontrent plus jamais leur agresseur. Or, la clef, selon l’étude dont il est question ici, résiderait plutôt dans le fait de s’exercer, encore et encore, à oublier. Jusqu’à ce que ça marche.

 


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