Le filtre du bilinguisme
(ASP) - S'il doit passer d'un langage
à l'autre, il ferme une section de sa mémoire
et passe à une autre. On croirait entendre parler
d'un ordinateur, mais c'est de notre cerveau dont il
est question: le cerveau des gens bilingues.
Apparemment, ceux-ci "sélectionnent"
une des deux langues qu'ils parlent en activant une
région du cerveau qui, autrement, serait restée
inactive chez ceux qui ne parlent qu'une seule langue.
C'est de cette façon qu'ils éviteraient
de parler un charabia où se mêleraient
des mots des deux langues.
L'étude, publiée dans la
revue britannique Nature et réalisée
par une équipe de neuropsychologues allemands,
portait sur des Espagnols: d'un côté, des
gens ne parlant qu'espagnol, et de l'autre, des bilingues
espagnol-catalan. Les "cobayes" devaient réagir
à des mots qui s'affichaient sur un écran,
tandis que ce qui se passait dans leur cerveau était
scruté à la loupe.
Ce n'est pas une surprise que de dire
que ceux qui sont réellement bilingues mêlent
rarement les mots des deux langues qu'ils emploient.
Mais cette capacité qui semble banale représente
en réalité un exploit, du point de vue
de l'apprentissage, quand on considère l'importance
que prend, dans notre cerveau, le seul apprentissage
d'une première langue. Ou quand on considère
la façon dont fonctionne le reste de la mémoire:
on ne peut pas, en effet, décider un beau matin
de "désactiver" la région de notre mémoire
consacrée au cinéma, parce qu'on a un
examen de mathématiques.
Et pourtant, c'est ce que font couramment
les gens bilingues: tout au plus, cela les rend légèrement
plus lents que les autres pour identifier les mots (sept
dixièmes de seconde): le temps que leur "filtre"
choisisse la bonne langue...