L'euthanasie, un droit humain?
(ASP) - Diane Pretty veut mourir "dans
la dignité". Cette Britannique de 43 ans
sest présentée devant la Cour européenne
des droits de lhomme, à Strasbourg, le
mardi 19 mars, pour réclamer des juges quils
autorisent
son mari à laider à se suicider
sans risquer dêtre inquiété
par la justice britannique.
Elle qui souffre dune sclérose
latérale amyotrophique, maladie neurodégénérative
irréversible et incurable, ne peut "même
pas bouger un bras" et a besoin dune aide
externe pour laider à mourir. En novembre,
la Chambre des Lords, la plus haute instance judiciaire
britannique, avait refusé daccorder par
avance limmunité à son mari, qui
risquerait alors 14 ans de prison pour homicide.
Devant les juges, cette femme encore en
pleine possession de ses facultés intellectuelles
a fait valoir son droit à "linterdiction
de traitements inhumains et dégradants":
sa maladie entraîne des souffrances quelle
considère comme insupportables et un manque de
dignité. Elle a aussi invoqué son "droit
à la vie privée", son "droit
à agir selon sa conscience" et fait appel
à "linterdiction de toute discrimination":
le suicide nétant plus illégal en
Grande-Bretagne depuis 1961, interdire à Diane
Pretty de se faire assister par son mari entraînerait,
dit-elle, une discrimination à légard
des personnes handicapées qui ne peuvent pas
se suicider par elles-mêmes.
Le gouvernement britannique, de son côté,
soutient que "le suicide nest pas un droit"
même sil nest plus illégal.
Et surtout, il sinquiète des dérives
possibles si les juges accèdent à la demande
de Diane Pretty: "lhôpital qui sauverait
une personne dune tentative de suicide pourrait
être condamné", a déclaré
son représentant devant les juges.
Cest la première fois que
la Cour de Strasbourg est interpellée sur la
question de leuthanasie et du suicide assisté.
Mais
le débat anime la société civile
depuis quelques années et plusieurs législations
ont déjà évolué sous la
pression du public. Aux Pays-Bas, la pratique est devenue
légale depuis le 1er janvier; en Belgique, une
loi décriminalisant le suicide assisté
est en passe dêtre adoptée. Et en
Corée du Sud, les médecins ont tenté
un coup de force cet hiver en publiant un nouveau code
de déontologie médicale autorisant le
refus de lacharnement thérapeutique (ou
euthanasie passive). Laffaire a secoué
le pays car la pratique y reste totalement illégale,
où elle est assimilée à un homicide.
Vendredi, dans une affaire impliquant
une femme paralysée des pieds à la tête,
et connue seulement sous le nom de Mlle B, la Haute
Cour de Londres a
autorisé le débranchement du respirateur
artificiel. Des groupes de femmes ont accueilli
avec satisfaction la décision, tandis que des
groupes dhandicapés sen sont inquiétés.
Isabelle Cuchet