Les données
continuent en effet
de s'accumuler sur l'extinction
des espèces.
Et cette fois, ce sont
les insectes qui en
tracent un portrait
dramatique. Un suivi
à long terme
(40 ans) de la faune
et de la flore britanniques
suggère que les
insectes, qui constituent
pourtant les êtres
vivants les plus résistants
aux changements après
les bactéries
sont
eux aussi en train de
vivre une inquiétante
extinction.
Plus précisément:
sur 58 espèces
de papillons présents
dans les îles
britanniques, 71% ont
décliné
ou ont disparu depuis
20 ans. De même
pour 54% des espèces
d'oiseaux. Et pour 28%
des espèces de
plantes, si on remonte
de 40 ans en arrière.
Ces données
étalées
sur des décennies
sont le fruit des observations
patientes de quelque
20 000 naturalistes
amateurs. Aucune
base de données
dans le monde n'a une
ampleur comparable (15
millions d'observations,
chiffres et tableaux).
Une cause
possible de ce déclin
est évoquée
dans une seconde étude,
indépendante
de la première
et elle aussi parue
dans la revue américaine
Science: la pollution
par l'azote. Une équipe
britannique de l'Open
University a pris des
mesures dans 68 champs
à travers les
îles britanniques
et en arrive à
la conclusion que là
où le taux d'azote
est le plus élevé
dans l'herbe, c'est
également là
qu'on trouve la moins
grande variété
d'insectes.
Quelle
qu'en soit la raison,
les experts auraient
pourtant cru que le
nombre énorme
d'insectes les mettait
à l'abri d'un
pareil déclin
et qui plus est,
sur une période
de temps aussi courte.
Mais s'il n'en est rien,
alors ce n'est pas seulement
ce petit monde pratiquement
invisible à nos
yeux qui est en danger:
c'est
toute la planète
qui est dans le trouble.
Les insectes
constituent en effet,
à eux seuls,
quelque 50% des espèces
vivantes: une hécatombe
chez eux signifierait
un bouleversement majeur
de la biodiversité,
qui se répercuterait
d'un bout à l'autre
de la chaîne alimentaire.
C'est ce qui rend cette
étude tout aussi
inquiétante,
sinon plus, que celles
qui, ces dernières
années, ont signalé
un déclin des
plantes, des poissons,
de certaines espèces
de mammifères
et (surtout) des oiseaux.
"Si la
même chose se
produit à travers
le monde, alors nous
sommes peut-être
en train d'assister
à la
plus grande hécatombe
depuis l'extinction
de masse qui a tué
les dinosaures il
y a 65 millions d'années,
écrit le chercheur
principal, Jeremy Thomas,
du Conseil de recherche
sur la nature et l'environnement,
qui a piloté
l'étude.
Les biologistes
s'entendent depuis plusieurs
années pour dire
que la Terre a vécu,
depuis l'émergence
des premières
formes de vie complexes,
cinq extinctions de
masse: celle des dinosaures
est la mieux connue.
Chaque fois, les deux
tiers, voire les trois
quarts des espèces
de la planète
ont été
éradiquées.
La plus sévère
aurait eu lieu il y
a 250 millions d'années,
et certains estiment
que jusqu'à 90%
des espèces animales
et végétales
de l'époque auraient
été balayées,
à la suite d'une
catastrophe pluie
de météorites,
éruptions volcaniques,
explosion de méthane?
qui n'a pas encore été
identifiée.
A court
terme, qu'est-ce qui
peut être fait
dans le reste du monde
pour limiter un déclin
similaire à celui
observé en Grande-Bretagne?
Protéger les
habitats, répondent
systématiquement
les écologistes:
c'est la mesure la plus
urgente. Pour le reste,
on verra plus tard quand
on en saura plus.