La firme d'investissement BMO Nesbitt Burns
a ainsi publié une série de documents mêlant
santé publique et stratégies d'investissement.
Où on peut lire par exemple, rapporte
Seed, que si la grippe aviaire devait prendre
des proportions dévastatrices, un "pourcentage disproportionné
des 20 à 40 ans risque de mourir, affaiblissant le
marché immobilier en raison de l'excès de
la demande". Vous voilà sûrement plus heureux
d'avoir cette information.
Plus froide encore est la recommandation qui
suit: "ceux qui veulent protéger leurs actifs et
gagner de l'argent bénéficieront ultimement
en achetant des propriétés, des fermes, des
entreprises et des actions à des prix extraordinairement
bas. Cela peut paraître plutôt insensible, parce
que le taux de mortalité serait élevé,
mais ceux qui avaient des réserves financières
pendant la Dépression furent capables d'acquérir
des propriétés de ceux qui étaient
fortement endettés. Une épidémie serait
encore pire, en ceci que la plupart éviteraient les
refuges et les soupes populaires, ayant payé le prix
ultime."
C'est apparemment rassurant de savoir que
même si des millions devaient y laisser leur vie,
d'autres réussiraient à s'enrichir.
Progrès sur le front
Malheureusement pour ces génies du
marché boursier, des voix commencent à s'élever
pour dire qu'on a peut-être surestimé le risque.
Les calculs les plus inquiétants jusqu'ici étaient
basés sur le nombre de morts (officiellement, 78,
selon l'Organisation mondiale de la santé) par rapport
au nombre de cas confirmés de grippe aviaire (147,
en date du 13 janvier): résultat, on a souvent pu
ententre dans les médias que le taux de mortalité
était de 50%.
Sauf qu'il y a probablement eu, ces dernières
années, de nombreux autres humains atteints de grippe
aviaire et dont les autorités n'ont rien su. Ils
ont toussé, ont eu une forte fièvre, ont gardé
le lit pendant plusieurs jours et puis ont survécu.
Combien étaient-ils? Une étude parue le 9
janvier dans les Archives of Internal Medicine évaluait
que, rien qu'au Vietnam, le nombre de cas de grippe aviaire
pourrait avoir été de 650 à 700.
Si tel est le cas, cela voudrait dire que
le taux de mortalité (78 personnes) viendrait de
chuter sous les 10%. Et on n'a pas encore mené de
semblables évaluations en Chine, où des versions
"bénignes" de la grippe aviaire ont pu également
se présenter.
Enfin, les dernières nouvelles sur
le front de la recherche proviennent des chats. Des tests
menés par une équipe néerlandaise sur
ces animaux révèlent que le virus de la grippe
aviaire s'attaque à des tissus à travers tout
le corps. Cela suggère que le virus peut nous infecter
de l'intérieur par l'intermédiaire de ce que
nous mangeons.
C'est en soi davantage une confirmation qu'une
révélation, puisqu'on se doutait bien que
le fait de manger de la volaille contaminée avait
été un facteur dans la propagation de la maladie
en Asie. Mais c'était une information difficile à
confirmer, en raison du petit nombre de victimes humaines
chez qui une autopsie avait pu être pratiquée
à temps. La recherche néerlandaise est parue
dans l'American Journal of Pathology, journal davantage
habitué à parler d'autopsies sur des humains
que sur des animaux mais cette fois-ci, on ne s'en
plaindra pas, quoi qu'en disent les banquiers.
Pascal Lapointe