Contrairement aux plantes génétiquement modifiées, qui font la manchette à l’occasion, les animaux génétiquement modifiés restent dans l’ombre. Il faut dire que la grande majorité d’entre eux sont encore qu’au stade de recherche et de développement. Bref survol…

En 1980 fût développé le premier animal transgénique, soit une souris qui sécrétait une plus grande quantité d’hormone de croissance. Sa taille était similaire à celle d’un petit rat. La première plante transgénique a été développée 3 ans plus tard !

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En plus de la recherche fondamentale, la transgénèse est appliquée aux animaux d’élevage. Aussi, certains animaux transgéniques servent à fabriquer des produits thérapeutiques et d’autres pourraient être utilisés comme donneurs d’organes.

La recherche fondamentale

La transgénèse rend possible la création de modèles pour l’étude des maladies humaines. De plus, l’amélioration des techniques de transgénèse permet l’utilisation de diverses espèces, comme le porc, dont l’anatomie ressemble beaucoup à la nôtre.

L’amélioration d’animaux d’élevage

Dès 1985, des chercheurs du ministère de l’Agriculture des États-Unis (USDA) réussissaient à générer des porcs surexprimant l’hormone de croissance. Objectif : créer des animaux plus maigres et plus musclés. L’objectif a été atteint, mais les porcs étaient aussi plus sensibles à certaines maladies, comme les pneumonies et l’arthrite… Le projet a donc été abandonné.

Des travaux similaires sont présentement en cours chez le poisson. Par exemple, en 2001, une compagnie a déposé aux autorités américaines une demande de commercialisation pour un saumon transgénique exprimant un surplus d'hormone de croissance. Ainsi il atteint sa taille adulte plus rapidement, sans toutefois la dépasser. La demande de commercialisation est toujours à l’étude.

Toujours en 2001, des chercheurs de l’Université de Guelph ont inséré chez le porc un gène bactérien qui exprime la phytase dans les glandes salivaires. Pourquoi cette insertion ? Parce que la phytase est un enzyme qui aide à mieux absorber le phosphore contenu dans la moulée. Contrairement aux animaux polygastriques (ex. vaches et chèvres), les animaux monogastriques, dont les porcs, ne sont pas des hôtes pour les microorgansmes qui sécrètent cet enzyme . Ainsi, pour maximiser leur croissance, du phosphore doit être ajouté à leur alimentation. Conséquemment, le lisier qu’ils produisent en contient beaucoup. Or, ce rejet de phosphore constitue le facteur de pollution principal de la production porcine. En effet, il provoque, à forte dose, l’eutrophisation des lacs. Quant à eux, les porcs modifiés « EnviropigsMC » rejettent jusqu’à 75% moins de phosphore dans leur lisier que les porcs non modifiés.

Et chez la vache ? Plusieurs modifications ont été effectuées afin de changer la composition de son lait ou d’en augmenter la production. Par exemple, il est possible d’en diminuer la teneur en lactose, qui provoque de l’intolérance chez certains consommateurs. Afin de faciliter la fabrication du fromage, la teneur en caséine peut être augmentée. D’autres modifications visent l’augmentation des oméga-3, reconnus pour leurs effets bénéfiques sur la santé. La transgénèse permet aussi la production de protéines antibactériennes dans les glandes mammaires des vaches, diminuant ainsi l’utilisation d’antibiotiques pour prévenir les mammites (infections des pis).

Les modifications génétiques ne s’appliquent pas seulement aux animaux d’élevage. En effet, depuis 2004 une compagnie américaine commercialise un poisson rouge fluorescent (GlofishMC). Ce dernier exprime un gène de fluorescence provenant d’un corail. Aussi, dernièrement, un lapin fluorescent a été exposé dans un musée européen en tant qu’objet d’art.

Par ailleurs, la transgénèse permet l’introduction d’un gène sécrétant une protéine fluorescente dans le système reproducteur mâle d’anophèles (insectes). La séparation à grande échelle des mâles et des femelles est ainsi plus facile. Les mâles sont stérilisés et pourraient être relâchés afin d’abaisser la population de ces moustiques reconnus pour propager la malaria.

Moléculture

Au Québec, une compagnie a développé des chèvres transgéniques qui produisent dans leur lait une protéine provenant de l’araignée. Cette dernière utilise la protéine pour la production de son fil. Celui-ci étant reconnu comme très résistant, le marché visé par la compagnie est l’industrie militaire (vestes pare-balles).

On nomme moléculture cette utilisation d’organismes vivants génétiquement modifiés pour la fabrication de produits industriels.

Xénotransplantation

La pénurie croissante d’organes d’origine humaine pour les greffes a incité les chercheurs à se tourner vers les animaux, en particulier vers le porc. En fait, des milliers de porcs sont abattus quotidiennement pour l’alimentation et une grande quantité d’organes pourraient être récupérées de ces abattages. De plus, ces animaux peuvent être reproduits en milieux dépourvus de pathogènes, ce qui diminue d’autant les risques de transmission de maladies infectieuses pour l’humain.

La xénotransplantation - la transplantation d’organes d’animaux chez l’humain - se heurte à un problème majeur : le rejet des organes d’origine animale par notre système immunitaire. Quoi faire ? L’inactivation d’un certain gène porcin et l’ajout de certains gènes humains chez des porcs transgéniques sont susceptibles de réduire ce rejet. D’ailleurs, une fois greffés chez des singes, les reins de ces animaux n’ont fait l’objet d’aucun rejet pendant plusieurs mois. Cependant, aucune tentative n’a été réalisée chez l’humain, car certains risques potentiels doivent encore être évalués, tel que le transfert possible de virus du porc à l’humain.

Conclusion

Mis à part les poissons rouges fluorescents, les exemples mentionnés plus haut sont à divers stades de développement. Leur commercialisation, ou non, dépendra de leur coût économique et de l’évaluation de leurs risques environnementaux et sanitaires (pour l’animal et l’humain). De plus, les agences gouvernementales concernées devront s’assurer que leur réglementation actuelle sera ajustée afin de pouvoir encadrer adéquatement d’éventuelles mises en marché d’animaux transgéniques.

Au-delà de ces considérations pratiques, les développeurs de tels animaux doivent être conscients que la transgénèse est perçue par certains comme un changement radical face aux pratiques traditionnelles d’amélioration animale. L’acceptation par la population de cette innovation technologique peut prendre encore quelques années…

Références

Gouvernement du Québec. Utilisation potentielle des animaux GM. http://www.ogm.gouv.qc.ca/infopot_animaux.html

Mackenzie AA (2005). La biotechnologie appliquée à la santé et à la production animales. Revue scientifique et technique 24 (1). http://www.oie.int/fr/publicat/RT/F_RT24_1.htm

Observatoire de la génétique (2005). Numéro 25. http://www.ircm.qc.ca/bioethique/obsgenetique/archives/archives.html

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