Des études ont démontré la possibilité d'effets des OGM sur l'environnement. Or les conditions environnementales (par exemple, insectes, climat, etc.) dans lesquelles ces études ont été effectuées ne sont pas nécessairement les mêmes qu’au Québec. C’est pour cette raison qu’une étude subventionnée par le ministère du Développement durable, de l’Environnement et des Parcs s’est penchée sur les effets environnementaux des OGM sur le territoire québécois...

Petit retour en arrière

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L’amélioration génétique des cultures agricoles ne date pas d’hier. La plupart de celles-ci sont issues de nombreuses années de croisements et de sélection des meilleurs descendants. Dans les années 1970, une nouvelle technique, la transgénèse, a fait son apparition. Cette technique consiste à introduire le gène d’un organisme dans le bagage génétique d’un autre. Elle permet ainsi d’accélérer le processus d’amélioration et de franchir la barrière des espèces. Les organismes issus de la transgénèse sont communément appelés organismes génétiquement modifiés (OGM). La première transgénèse d’une plante a eu lieu en Belgique en 1983. Tandis que la commercialisation d’OGM agricoles a débuté aux États-Unis en 1994. Au Québec, celle-ci commença en 1996.

Quels sont les OGM agricoles commercialisés ici ?

Pour le moment, les OGM semés ici possèdent soit l’une ou les deux caractéristiques suivantes : une tolérance à un herbicide et une résistance à certains insectes. En voici une brève description.

Cultures tolérantes aux herbicides

Des variétés de canola, de maïs et de soja ont été génétiquement modifiées afin de produire un enzyme issu d’une bactérie du sol. Cet enzyme dégrade un herbicide, principalement le glyphosate ou le glufosinate. À quoi sert cette modification ? Elle sert à rendre ces variétés tolérantes à l’herbicide, ce qui facilite le contrôle des mauvaises herbes par les producteurs agricoles. Au Québec, environ 40% du soja et 75% du canola sont tolérants aux herbicides.

Cultures résistantes aux insectes

Bacillus thuringiensis (Bt) est une bactérie du sol qui produit une protéine toxique pour certains insectes, dont la pyrale du maïs, principal insecte ravageur de cette culture. Le Bt est utilisé comme insecticide en agriculture biologique depuis près de 60 ans. Le gène bactérien fabriquant cette toxine a été isolé, puis inséré dans certaines variétés de maïs, les rendant ainsi résistantes à la pyrale. Au Québec, le maïs Bt représente environ 40% du maïs-grain, soit le maïs servant à l’alimentation animale.

Ces OGM ont-ils des effets sur l’environnement ?

L’utilisation d’OGM en agriculture pourrait montrer des effets environnementaux tant positifs que négatifs. Les effets positifs rapportés sont : la diminution des superficies cultivées découlant d’un rendement accru, la diminution de la quantité de pesticides utilisés et le recours à des pesticides moins nocifs. Les effets négatifs mentionnés sont : le développement d’une résistance des organismes ciblés (par exemple, la pyrale face au maïs Bt) ou la baisse de la diversité (par exemple diminution de la population de coccinelles). D’autres études soulèvent le risque d’une dispersion du pollen des OGM vers des plantes apparentées, tant cultivées que sauvages. Les conclusions de toutes ces études ne peuvent pas être nécessairement généralisées pour le Québec. Pourquoi? Parce que les conditions environnementales dans lesquelles ces études ont eu lieu ne sont pas forcément les mêmes qu’ici.

Afin de fournir des données adaptées à nos conditions environnementales, le ministère du Développement durable, de l’Environnement et des Parcs a subventionné une équipe de recherche de l’Université Laval. L’équipe a étudié les effets environnementaux des OGM dans des champs situés près de Québec (2003-2004) et de Saint-Hyacinthe (2004). Voici les principaux résultats obtenus.

Résultats

Cultures tolérantes aux herbicides (maïs et soja)

Les résultats confirment l’hypothèse que le glyphosate et le glufosinate ne sont pas toxiques pour les cultures qui leur sont tolérantes. Par ailleurs, le rendement en grains de ces dernières était similaire à celui obtenu avec les cultures conventionnelles. De plus, il y avait sensiblement la même quantité de mauvaises herbes dans les champs de cultures tolérantes que dans les champs de cultures conventionnelles. Bref, à première vue il ne semble pas y avoir de différence. Mais qu’en est-il vraiment ? Y a-t-il des effets indirects ou à long terme ?

Quotient d’impact environnemental (QIE)

Le QIE quantifie l’effet d’un herbicide sur différents éléments de l’environnement, permettant ainsi de comparer diverses stratégies de désherbage. Il est calculé à partir de données sur la toxicité de l’herbicide (par exemple, son effet sur les insectes) et sur le comportement de celui-ci dans le milieu (par exemple, le temps nécessaire à sa dégradation). Plus le QIE d’un herbicide est élevé, plus ce dernier a un effet négatif sur l’environnement.

Le calcul du QIE pour les différentes stratégies de désherbages à l’étude a démontré que les stratégies à base de glyphosate ou de glufosinate ont un effet moins marqué sur l’environnement que celles basées sur les herbicides généralement utilisés avec les cultures conventionnelles. Par contre, cet avantage est perdu lorsqu’un deuxième herbicide est ajouté au glyphosate ou au glufosinate. Pourquoi cet ajout ? Parce que ces herbicides se dégradent rapidement, donc certains producteurs agricoles leur additionnent un second herbicide dit « résiduel », afin de mieux contrôler la repousse des mauvaises herbes.

Cultures résistantes aux insectes (Maïs)

En 2003, les rendements en grains des maïs conventionnels et Bt se sont avérés similaires. Tandis qu’en 2004, les rendements ont été similaires dans les champs expérimentaux situés près de Saint-Hyacinthe, mais dans les champs de la région de Québec, les rendements des maïs Bt étaient de 10 à 15 % supérieurs à ceux des maïs conventionnels. Cet écart était probablement causé par un plus grand nombre de pyrales dans la région de Québec.

Indice de biodiversité au champ

L’indice de biodiversité au champ tient compte du nombre d’espèces d’insectes présents et de leur population. Il est demeuré constant dans tous les champs de maïs Bt à l’étude. Cela signifie que les différents maïs Bt étudiés ne semblent pas avoir d’effet sur les populations d’insectes non ciblés, notamment les pucerons et les coccinelles.

Des essais complémentaires ont été réalisés en serre, afin de préciser l’effet des maïs Bt sur les pucerons. Pourquoi les pucerons ? Car il s’agit d’insectes fréquents dans les champs de maïs au Québec. Encore une fois, les maïs Bt étudiés ne semblaient pas avoir d’effets sur les pucerons. Ce qui confirmait les résultats obtenus en champs.

Conclusion

Sous les conditions d’ici, l’étude québécoise démontre que les herbicides associés aux cultures tolérantes semblent être performants et, si employés seuls, moins nocifs pour l’environnement que ceux associés aux cultures conventionnelles. Par ailleurs, les maïs Bt n’ont pas eu d’effet significatif sur les insectes non ciblés. Une telle absence d’effet n’assure toutefois pas un gain économique. Car le coût supplémentaire des semences de maïs Bt ne semble justifié que si leur rendement est supérieur à celui des semences de maïs conventionnels. Or le rendement des différents maïs dépend du niveau d’infestation de pyrales du champ cultivé. Bref, l’achat de semences de maïs Bt ne semble justifié que si un fort niveau d’infestation de pyrales est prévu.

De plus, de nouveaux OGM sont en développement, par exemple dans le domaine de la « moléculture ». Celle-ci vise la production par des OGM de molécules d’intérêts pharmaceutique, telle que l’insuline, ou industriel, tels que des plastiques. Quels seront les effets environnementaux de ces OGM ?

Références

Michaud D. et al. (2005) Impacts environnementaux associés aux cultures transgéniques. Rapport final présenté au Ministère du Développement durable, de l’Environnement et des Parcs (Projet MENV-PARDE 02-1). Les résultats sont disponibles en ligne au www.ogm.gouv.qc.ca/environnement

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