Notre société vieillit. Alors que la technologie est accusée de tous les maux (parfois avec raison), la science et le développement continu de la médecine font en sorte que l'espérance de vie dans les pays développés augmente d'environ 3 mois chaque année. Cela veut dire qu'un bébé né en 2008 a l'espoir de vivre 2 ans de plus que son frère ou sa soeur né en 2000. Mais est-ce vraiment une bonne nouvelle? L'impact du vieillissement, conjugué à un taux de natalité inférieur à deux, implique qu'il n'y aura bientôt plus assez de personnes pour venir en aide aux vieux. De même, les coûts associés au système de soins de santé explosent, ce qui risque de déséquilibrer notre économie. Est-ce que la science se retourne contre nous?

Pour moi, cette question n'a aucun sens. Les prises de position des démographes, qui s'alarment face au vieillissement de la population, ne sont pas plus raisonnables, me semble-t-il. Tout changement dans la structure de la société implique un déplacement des dépenses d'un poste budgétaire à un autre. Ainsi, avant l'automobile, la voirie était beaucoup moins coûteuse. Est-ce une raison suffisante pour se débarrasser de ce mode de transport? La même chose s'applique ici et les changements qui s'annoncent dans la pyramide des âges sont une bonne occasion de revoir la façon dont on s'occupe de la population vieillissante et de la position qu'occupe celle-ci dans notre société.

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Comme il s'agit d'un billet scientifique, je veux me concentrer ici sur le rôle que les technologies peuvent jouer afin de préserver autant que possible l'autonomie des personnes âgées. Il ne s'agit pas d'ignorer les défis qui attendent une société vieillissante, mais le Québec et le Canada ne seront pas les premiers à passer par là. En étudiant ce que font les autres sociétés, nous pourrons certainement éviter quelques erreurs et faire de meilleurs choix.

Considérons le Japon, par exemple, dont le vieillissement s'accélère par la faute d'un taux de natalité particulièrement bas et d'une décision politique de ne pas favoriser l'immigration; les Japonais ont décidé de s'en remettre entièrement à eux-mêmes. Les conséquences de cette situation sont immenses : la proportion de la population en âge de travailler diminue alors que les besoins en personnel pour s'occuper des personnes âgées augmentent. La solution, comme on pourrait s'y attendre dans le cas du Japon, est de se tourner vers la technologie. Après tout, les Japonais sont les grands spécialistes des robots et ils investissent massivement dans le développement d'une nouvelle famille de robots à usage domestique. Ces robots pourront aider les personnes à prendre leur bain, à se lever d'un fauteuil ou du lit, à se déplacer et à transporter leurs achats, par exemple, et avertir les autorités en cas d'accident. Ces exemples ne jaillissent pas de mon imagination. De tels robots existent dans les laboratoires de recherche, mais ils ne sont pas encore en production. C'est qu'un robot, ça coûte cher. Mais il faut remettre ce coût en perspective. Une personne âgée en centre hospitalier de soins de longue durée (CHSLD) coûte plusieurs milliers de dollars par mois à la société. Même à domicile, les soins spécialisés et les aides domestiques coûtent facilement entre 10 000 et 20 000 $ par année. Un robot de 50 000 $ permettrait donc à la société d'économiser dès la quatrième année de sa mise en service — surtout si le personnel libéré peut se tourner vers des tâches plus créatives qui rapportent plus, tout en offrant un service jour et nuit.

S'il est peu probable que les robots débarquent en grand nombre avant au moins une dizaine d'années, d'autres percées pourraient se faire beaucoup plus rapidement puisque la technologie est déjà présente. Ainsi, on peut facilement imaginer remplacer les dosettes de médicaments par une machine qui prépare les pilules et avertit l'utilisateur au moment voulu; je suis étonné qu'une telle solution ne soit pas déjà en place. De même, grâce à internet et aux vidéoconférences (que j'utilise sur une base quotidienne grâce à iChat et à Skype afin de garder le contact avec mes étudiants lorsque je suis à l'étranger), il est possible de conserver un contact quotidien avec les personnes à domicile sans avoir à se déplacer constamment, ce qui diminue les coûts et permet d'offrir une meilleure supervision.

La technologie jouera donc un rôle important afin de permettre à notre société vieillissante de soutenir convenablement les personnes âgées. Diminuant le sentiment de dépendance qui affecte beaucoup de gens aux forces physiques déclinantes, la technologie permettra à ceux-ci de conserver leur indépendance, si importante.

La science n'a pas réponse à tout et la technologie ne permettra pas de briser complètement l'isolement des personnes âgées, un des plus grands maux de la vieillesse. Malgré tout, les percées technologiques offriront la chance aux personnes âgées de maintenir une participation plus active dans la société, ce qui ne pourra qu'être bénéfique pour tout le monde.

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