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Vous vous êtes déjà demandé d’où vient l’imagination. Qu’est-ce qui surgit de nulle part pour devenir et être. Moi oui, je me le demande constamment.

Voici un exemple pour alimenter notre réflexion.

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C’est l’histoire d’un gars qui est bibliothécaire en Égypte, il y a de cela pas mal longtemps. Il mène une petite vie bien ordinaire. Après son travail, il rentre à la maison, retrouve sa famille et s’adonne à des activités de circonstances.

À la nuit tombée, il se couche, souhaite bonne nuit à sa femme et s’endort profondément. Chaque jour ressemble à celui de la veille. Celui de demain sera comme celui d’aujourd’hui.

Un soir, il ne se sent pas très bien, indisposé. Cette nuit-là il ne trouve pas le sommeil. Une idée l’obsède. Il ne sait vraiment pas comment cette idée lui est venue. Et si la Terre n’était pas plate? Jusque-là on pensait, puisque la vie est plate, la Terre devait forcément l’être. D’ailleurs lorsque les navires quittent le port pour la haute mer, les épouses crient à leur mari au moment où ils sont encore à portée de voix: «Ne vas pas trop loin, tu pourrais atteindre le bord et tomber.» C’était tellement vrai que plusieurs navigateurs téméraires ne revenaient jamais.

Et si la Terre était ronde? Se demande notre insomniaque bibliothécaire. D’où lui vient cette idée? Nul ne le sait. Au déjeuner, il soulève la question à sa famille attablée ne recueillant que des regards médusés. «Qu’elle imagination» conclut son épouse sen desservant la table.

Dans les jours qui suivent, le bibliothécaire ajoute à sa capacité imaginative la déduction et la réflexion. Il se souvient alors d’avoir observé, aux premiers jours de l’été, que les rayons du Soleil atteignaient le fond de son puits à son chalet. Au même moment, une année où il avait reporté ses vacances de quelques jours, il avait remarqué que l’obélisque placé sur la grande place devant la bibliothèque faisait de l’ombre. Une idée saugrenue lui traversa l’esprit. Il mesura l’angle que faisait l’ombre projetée de l’obélisque.

Et il songea: au chalet, rien, zéro degré d’ombre; à la ville 7 degrés. Il résolut de mesurer la distance entre son lieu de résidence et son chalet. Pour ce faire, il compta le nombre de pas que faisait son dromadaire pour franchir cette distance et multiplia ce nombre par l’enjambée moyenne du dromadaire. Le dromadaire s’appelait Dromédarius. Aucun rapport avec l’histoire. Poursuivons.

Après avoir griffonné toutes ses données sur un papyrus, il conclut «elle est ronde!». C’est la seule explication à l’ombre portée. Si mes 10 000 pas de chameaux produisent une ombre de 7 degrés, combien de pas pour 360  degrés? C’est assez simple comme raisonnement.

Ce soir-là, notre bonhomme se glissa dans son lit un grand sourire accroché au visage. Non seulement il venait de démontrer que la Terre était ronde, mais il en avait même mesuré la taille.

Vous vous en rendez compte, un gars tout seul. Notre homme dormit alors paisiblement attendant la petite lumière qui allait peut-être rejaillir de nouveau dans son esprit et que l’on appelle l’imagination.

__ Notes:

1) Le bibliothécaire se nomme Eratosthène, sa bibliothèque est située à Alexandrie son «chalet» à Syène. Il vécut de -276 à -197 de l’ère chrétienne.

2) On annonce aujourd’hui (17 juillet 2013) l’attribution d’un financement substantiel à l’Université Concordia (à Montréal) pour une recherche sur la créativité. Bravo! Sans doute en saurons-nous bientôt davantage. Lire: «Le savoir que distille l’acte de création», Frédérique Doyon, Le Devoir.

3) J’ai assisté le mois dernier à plusieurs Assemblées générales tenues par divers organismes, dont certains en sciences. Zéro imagination, zéro créativité, zéro fraîcheur, pas une seule trace d’humour, rien. Les AG sont des sortes de messes cafardeuses, conformistes et obligées que l’on officie une fois l’an. Ce mâchouillage se poursuivra sans doute jusqu’à la fin des temps. Vite que le ciel nous tombe sur la tête. Le ciel peut-il nous tomber sur la tête? C’est le titre de mon prochain livre. Sortie prévue avant la fin du monde (en octobre).

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