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Débuter comme prof de sciences dans le secondaire, c'est du rock, avec un peu plus de claques que dans un pogo.

De retour à Bruxelles, je devais trouver un boulot, et vite ! Le portefeuille était très léger. Etant bioingénieur, le côté « ingénieur » permettait de rapidement décrocher des jobs dans le privé : banque et des trucs comme ça. Mais c'est pas pour moi. Alors, quand on m'a proposé de remplacer une prof de sciences en congé de maternité à l'Institut De Mot Couvreur à Bruxelles, une école technique et professionnelle, j'ai pas hésité. Rock'n'Roll. Ça me laisserait un peu de marge pour chercher un autre job.

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Je débarque légèrement en retard pour ma première journée de travail. Un seul rang reste dans la cours, accompagné de madame la Directrice Mme Tasiaux qui me lâche un mémorable « bon je vous les laisse, bonne chance. ». Ah ? Et effectivement, de sacrés castards cette classe de 3SciencesB ! Un élève en bout de rang se donne la peine de se déplacer pour se poster devant moi, scanne mon vieux pantalon, veste en cuir, cheveux peu coiffés. Il crie « c'est une histoire de ouf ! », tout le reste du groupe éclate de rire. Je leur demande de se rendre dans leur local mais ne connaissant pas cet immense établissement du vieux Bruxelles, les élèves en profitent pour me faire visiter l'école pendant l'heure de cours. Je dois avouer que depuis que je suis prof, j'ai connu mes premières vraies migraines. Cependant, alors que beaucoup de personnes seraient parties en courant après une telle mésaventure, j'ai décidé de m'accrocher, je ne voulais pas rester sur un échec, même si, au départ, l'enseignement était alimentaire et temporaire. Mais les formidables collègues de DeMot – je ne pourrai pas tous les citer – et la bienveillance discrète de Mme Barzin – préfète des études et ancienne prof de bio – qui en vu défiler plein d'autres ne sont pas du genre à me laisser seul dans un coin ! Ça donne pas mal de courage. Je me rappelle d'Atman Kourcha, prof de techno, méditant devant sa tasse de café dans la salle des profs « moi, je suis un barbouze de l'enseignement, on me donne une mission, je la fais ». Et on se donnait des airs de mercenaires avant de retourner en salle de cours, yeah.

Deux ans après ma première journée épique dans l'enseignement – oui, j'ai survécu – je commence à me sentir à l'aise avec mes élèves mais surtout, j'inscris une classe à l'expo-science, concours scientifique organisé chaque année par les jeunesses scientifiques de Belgique. Mes élèves présentent une expérience qui modélise le réchauffement climatique, un truc tout simple mais efficace : deux aquariums identiques et fermés hermétiquement avec une ampoule de même puissance à l'intérieur. Un des deux aquariums, à différence du deuxième, a une atmosphère chargée en dioxyde de carbone. Un thermomètre montre que la température est plus élevée dans une atmosphère chargée en CO2 ! Quelques panneaux, 2-3 vidéos, de bonnes explications, des élèves sympas et bang ! On remporte le prix du public ! On nous redemandera même de remettre le couvert pour les cinquante ans des Jeunesses Scientifiques devant le Prince – à l'époque – Philippe et le Ministre de la recherche scientifique. La grande classe.

Après cette aventure avec mes élèves aux jeunesses scientifiques, j'ai en quelque sorte senti que j'avais le feu sacré. Alors voilà, je m'inscris pour passer l'agrégation en chimie-bio. Je vais encore faire la rencontre de sacrés numéros !

Mais ça, c'est pour le prochain épisode.

Je donne