marie-odile_monchicourt.jpg
J’ai le bonheur de vous présenter aujourd’hui une autre entrevue radiophonique avec Henri Laborit sortie de l’oubli grâce aux bon soins de M. Patrice Faubert. Après l’émission de télé Ex-Libris de 1992, l’entrevue à Radio Libertaire de 1987 et celle de Brigitte Vincent en 1991, c’est un entretien de 50 minutes de Marie-Odile Monchicourt réalisé le 26 mars 1989 dans le cadre de l’émission Sciences au naturel (France Inter) que j’ai trouvé dans le coffre au trésor de M. Faubert !

Mais avant de vous la présenter, je voudrais remercier tous les gens qui m’ont donné du feedback suite à la mise en ligne de la deuxième partie de mon film le 21 mai dernier, que ce soit dans les commentaires sous le billet ou par courriel. Éloge de la suite s’avère une aventure pleine de surprises et les traces que j’y laisse d’une semaine à l’autre se font vraiment « en marchant », comme disait Francisco Varela. Si certains billets sont plus anecdotiques, par manque de temps lorsque j’essaie moi-même de transmettre ailleurs un peu des connaissances des sciences cognitives d’aujourd’hui, je découvre fréquemment en écrivant ces billets des personnages et des univers fascinants dont j’ignorais tout.

Abonnez-vous à notre infolettre!

Pour ne rien rater de l'actualité scientifique et tout savoir sur nos efforts pour lutter contre les fausses nouvelles et la désinformation!

C’est le cas cette semaine de Marie-Odile Monchicourt, figure de proue de la vulgarisation scientifique française qui, sans doute parce qu’elle est plus une femme de la radio que de l’écrit30 ans de « Madame science » sur Radio France ! ») était passée sous mon radar, bien que nous exercions le même métier. Je découvre donc en quelques clics de recherche sur le Net tout son univers, et en particulier son travail récent et très original de diffusion scientifique avec les « LabOrigins », des spectacles scientifiques réunissant artistes et chercheur.es. Je n’ai pas le temps de rendre justice à tout cela aujourd’hui, mais j’y reviendrai peut-être tant je trouve intéressant sa démarche, qui rejoint totalement la mienne avec ce site, Le cerveau à tous les niveaux, ou certaines présentations sur la question de nos origines que j’essaie parfois d’aborder.

Pour l’instant, voici donc cet « entretien-rencontre » puisque Laborit, pouvant inviter une personne de son choix à l’émission, avait choisi le journaliste, historien et écrivain Jean Lacouture. . [ Écoutez l'entretien sur Éloge de la sutie en cliquant ici ] .

L’émission débute avec un extrait de Mon oncle d’Amérique et Marie-Odile Monchicourt oriente Laborit sur ce qui lui apparaît avec raison le thème central du film, l’inhibition de l’action. Laborit rappelle alors une fois de plus comment un organisme qui ne peut pas se faire plaisir dans son milieu, subit des bouleversements dans son système endocrinien et immunitaire qui, s’ils ne se résolvent pas rapidement par l’action, débouchent sur la pathologie.

L’entretien sera ponctué de plusieurs extraits sonores, dont le premier évoque la jungle amazonienne. Il faut dire que l’on va apprendre à la toute fin de l’entretien que Laborit vient alors de publier son autobiographie scientifique La vie antérieure, de sorte que plusieurs de ces extraits sonores auront pour fonction d’évoque des moments de la vie de Laborit. Ce premier extrait évoquait ainsi la mort de son père, médecin colonial en Guyane française, à l’âge de 31 ans, et la prime enfance de Laborit avec le forçat Kéal qui a pris soin de lui. Suivra une évocation des intérêts artistiques de Laborit pour la peinture et la musique, ce qui débouchera sur son rapport à sa mère, musicienne, et aux femmes en général avec qui il dit n’avoir jamais eu de rapport de compétition, contrairement aux hommes.

Arrive ensuite, vers la vingtième minute, Jean Lacouture qui vient d’écrire un livre sur le grand égyptologue Jean-François Champollion, premier à déchiffrer les hiéroglyphes. Lacouture explique en quoi écrire cette biographie a été différent des nombreuses autres qu’il a faites sur des hommes politiques français, et des extraits sonore de Mauriac, Malraux, Mendès France et De Gaulle nous les font bientôt entendre.

Vers la trentième minute, Monchicourt demande à Laborit si la guerre est explicable par l’inhibition de l’action. Laborit rappelle alors qu’un groupe social, comme un individu, essaie de maintenir sa structure. Et que souvent, un autre groupe est perçu comme limitant ou menaçant le maintien de cette structure. C’est alors qu'éclate la guerre et qu’on voit naître une « unité nationale », difficile autrement, par le seul fait de l’ennemi commun.

Cela amène Laborit à dire qu’il fait partie du Mouvement pour une alternative non-violente (MAN) et qu’il lit leur bulletin (aujourd’hui ce serait leur site web…).On évoque ensuite l’affaire de la fatwa contre l’écrivain Salman Rushdie qui faisait rage à l’époque. Laborit commente en disant que tout cela est simple à comprendre quand on tient compte des jugements de valeur, religieux ou autre, qui rentre littéralement dans nos systèmes nerveux en bas âge et qui nous donne notre identité. Quand les fondements de cette identité sont niés, il n’est pas étonnant que cela puisse générer des menaces et des violences. Tout cela est simple à comprendre, dit Laborit, mais ce qui est compliqué, c’est d’expliquer aux humains comment ça marche pour ne plus que ces violences se reproduisent.

Vers la quarantième minute, le concept de liberté passe donc rapidement à la trappe, façon Laborit, qui montre comment la tolérance peut alors surgir et prendre sa place pour le mieux. Il replace ensuite gentiment Lacouture qui évoque son fond chrétien pour croire à la liberté en lui rappelant que le jeune homme riche de la Bible n’avait pas réussi à suivre le Christ, embourbé qu’il était dans ses privilèges qu’il ne voulait pas perdre !

Laborit a tout de même de très bons mots pour le livre de Lacouture et lui pose une question difficile, vers la fin de l’entretien, sur la naissance quasi simultanée de l’écriture en Mésopotamie et en Égypte.

Je donne