Illustration

Les outils numériques permettent l'apprentissage collaboratif, à travers le phénomène des cours en ligne (les MOOCs et assimilés). Vers le partage des connaissances, donc, seule matière qui augmente quand on la partage.

Lors de mon stage en journalisme scientifique, j'ai rédigé un article sur les MOOCs et leurs nouvelles formes. En cherchant des informations sur le sujet, j'ai eu envie de rédiger ce billet de blogue pour souligner deux points qui me semblent importants.

Le premier est l'importance du caractère ouvert de tous de ces outils, le M de l'acronyme. Il ne faut pas paniquer quand on voit que ça fonctionne, ce qui est tout de même un comble. Le deuxième est le caractère collaboratif de ces outils, ce qui n'est pas le C de l'acronyme mais ç'aurait pu. L'objectif est d'ouvrir et partager les connaissances, pas de créer de nouvelles inégalités et destructions des individus.

Petit point sur ce que sont les différentes formes de cours en ligne

Abonnez-vous à notre infolettre!

Pour ne rien rater de l'actualité scientifique et tout savoir sur nos efforts pour lutter contre les fausses nouvelles et la désinformation!

Les MOOCs, pour Massive Open Online Course, sont des cours gratuits et libres d’accès (j'utiliserai d'ailleurs le terme cours en ligne dans la suite de billet de blogue). Vidéos, textes, liens, forums, quiz, évaluation par les pairs, le principe est de démocratiser les connaissances. Aujourd'hui, les communautés sont mises en place et animées par des professionnel·le·s d'après ce que j'ai vu, mais vivement que des associations et d'autres acteur·trice·s s'emparent de ces outils :-D

L'initiative venant de l'enseignement supérieur, les premiers cours en ligne portent sur les sciences techniques, plutôt informatique ou astrophysique de ce que j'ai vu. Heureusement, d'autres domaines se développent. Management et entreprises d'un côté, connaissances grand public de l'autre, entre biologie, histoire, sciences politiques au sens large de l'organisation du monde et même un cours en ligne sur la fantasy qui commence sa troisième session. Plus les connaissances sont diversifiées, mieux c'est !

Le succès de ces cours en ligne donnent lieu à de nouvelles formes d'apprentissages en ligne, chacune essayant de répondre à des besoins spécifiques. Les SOOCs, pour Small online open course, sont des cours en ligne suffisamment spécialisés pour restreindre de fait le nombre de personnes intéressées. Ce qui officialise le statut de certains MOOCs, comme celui sur l'Optimisation Stochastique Évolutionnaire (je ne me moque pas, j'écris juste que c'est très spécifique). Les COOCs, pour Corporate Open Online Courses, sont des cours en ligne dispensés par une société auprès de ses client·e·s ou salarié·e·s. L’acquisition des connaissances répond spécifiquement aux besoins de l’entreprise. Les SPOCs, pour Small Private Online Course, sont des cours privés et payants. Oui, payants. La nécessité d'être prudent·e·s se voit encore plus avec les réflexions sur les MOOCs de recrutement.

Le principe du caractère massif

En me renseignant sur le sujet, j'ai vu que certaines analyses s'inquiètent du haut taux d'abandon des inscrit·e·s aux cours en ligne. Quand on réfléchit dans le cadre d'un cours traditionnel, c'est vrai qu'un haut taux d'abandon est inquiétant. Mais pas là. Dans le cadre des cours ouverts à tou·te·s, avec ce caractère massif, il faut sortir de cette grille d'analyse inadaptée et se concentrer sur des indicateurs pertinents.

Pour un même sujet, qu'est-ce qui est préférable ? Un cours avec 1 000 inscrit·e·s et 20 réussites, ou un cours avec 500 inscrit·e·s et 20 réussites ? Force est de constater que le résultat est le même, donc que l'indicateur sur la proportion d'abandon est inintéressant au possible tout autant que décourageant inutilement. D'autant plus que, si on passe à 2 000 inscrit·e·s et 25 réussites, on y gagne autant sur les réussites en elles-mêmes que sur la visibilité du sujet. S'inscrire à un cours en ligne, c'est comme lire le description d'une formation dans un catalogue, ça n'engage à rien. Je me suis moi-même inscrit à des cours en ligne que j'ai laissés filer, soit parce que je m'étais rendu compte que le sujet ou la manière de l'aborder ne m'apporteraient pas ce que je cherchais, soit parce que je m'étais inscrit à six cours en ligne d'un coup et que la réalité temporelle du monde avait rattrapé mon enthousiasme. La semaine dernière, je me suis même inscrit à un cours en ligne juste pour voir une information dans le chapitre trois et faire un article dessus, vous pensez bien que je ne suis pas allé au bout donc que j'ai fait gonfler le chiffre qui n'a aucun sens.

Comment évaluer la réussite d'un cours en ligne, alors ? Le nombre de personnes qui vont jusqu'au bout n'a pas de sens tout seul, à cause de la différence des thématiques et de leur approfondissement. Il doit bien être pondéré par quelque chose, c'est vrai. Mais pas par le taux d'inscription. Par quoi, alors ? Je ne sais pas. Je ne sais même pas si on peut répondre à cette question. Je ne sais pas non plus si chercher à mesurer le partage des connaissances est une bonne idée, et vu que je pose la question vous pouvez deviner que j'en doute. Pourquoi cette frénésie de performance comptable ? Le partage des connaissances et les coopérations, ça ne suffit pas ? Bon, coup de gueule mis à part, on peut toujours imaginer des indicateurs basés sur les flux, ce sont des idées à creuser.

Les dangers de la récupération

En me renseignant sur le sujet, surtout, j'ai vu les dangers liés à la récupération de ces outils numériques par le monde de l'entreprise. Partager les connaissances pour aider aux formations ne me dérange pas plus qu'utiliser les outils numériques dans le monde de l'entreprise, mais certaines formulations révèlent des visions du monde pour le moins glaçantes.

Les dérives possibles peuvent se résumer en une idée : certain·e·s pourraient être tenté·e·s d'externaliser le coût des formations sur la « motivation » des candidat·e·s. Ça fait des économies ! Sauf pour les candidat·e·s, justement, qui se retrouvent avec une injonction à être motivé·e·s. Et on sait très bien ce que ça va donner. D'abord, les inégalités. Une personne aisée sera forcément favorisée par rapport à une personne pauvre qui ne peut pas physiquement se dégager du temps pour « faire preuve de sa motivation », parce que survivre c'est déjà pas mal. Du coup, toujours dans la même veine, la pression, le mal-être et les vies détruites. Et à terme, l'ubérisation des métiers d'enseignement, la fin des services publics de l'éducation, le chacun pour soi et si t'es pauvre crève en silence parce que c'est ta faute (ah non, ça, c'est déjà le cas). À quand un cours en ligne de sciences sociales sur le travail ?

Vis-à-vis de ces dangers, on n'en est pas là sur ce point de la révolution numérique, mais c'est une histoire de direction à prendre. Vers quels usages des outils numériques veut-on aller ? Que les cours en ligne servent de prétexte au chacun pour soi, ou qu'ils servent de tremplin au tou·te·s ensembles ? Là encore, vu la manière dont je formule mes questions, vous pouvez devinez les réponses que j'y apporte.


Ceci dit, le principe des cours en ligne ouverts à tous repose intrinsèquement sur le tou·te·s ensemble. Le tout, c'est que ce principe ne se dévoie pas dans sa mise en œuvre, afin qu'au contraire il se développe pour toutes les sciences et les connaissances que l'on voudra bien partager et donc augmenter.

N’hésitez pas à partager ce billet de blogue, ainsi qu’à le commenter pour partager vos avis et vos réflexions sur ces sujets.

Je donne