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C’est au début des années 1980, alors que j’étais étudiant à l’université McGill, que j’ai eu la chance de participer à mes premières campagnes hivernales d’échantillonnage dans le secteur de Kuujjuarapik (Poste-de-la-Baleine), dans le sud de la baie d’Hudson. Les travaux alors effectués par le Giroq (Groupe interuniversitaire de recherches océanographiques du Québec) et Pêches et Océans Canada avaient pour but d’acquérir des connaissances sur un environnement marin peu étudié jusqu’alors.

On voulait mieux comprendre la dynamique côtière sous le couvert de glace recouvrant la baie d’Hudson et étudier les différents maillons de la chaîne alimentaire marine en climat subarctique. Quelques années plus tard, un projet de centrale hydroélectrique sur la rivière Grande Baleine – projet qui ne s’est jamais concrétisé – a occasionné d’autres travaux d’échantillonnages visant à mieux connaître les estuaires de la Grande rivière de la Baleine, de la Petite rivière de la Baleine et de la rivière Nastapoka, afin de prévoir les impacts d’éventuelles modifications des débits fluviaux de ces trois rivières.

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Cet échantillonnage hivernal sous le couvert de glace débutait habituellement à partir du début avril et s’étirait jusqu’à la fin mai, parfois en juin, la débâcle de la Grande rivière de la Baleine se produisant habituellement vers la mi-mai et le couvert de glace demeurant présent dans le sud de la baie d’Hudson jusqu’à la fin du mois. Il faut dire qu’on enregistre dans le secteur des températures extérieures négatives pendant la majeure partie du mois d’avril, et parfois même jusqu’à -20 ˚C ! Mais avec le réchauffement planétaire, il est probable que cette situation soit appelée à changer dans les décennies à venir et que le même genre d’échantillonnage doive se faire plus tôt en saison pour trouver des conditions de glace similaires à ce que l’on retrouvait dans les années 1980.

Moi qui rêvait initialement d’explorer les eaux chaudes des tropiques, j’ai adoré le travail d’échantillonnage dans le nord du Québec. C’était un travail éreintant et comportant des risques, mais combien satisfaisant ! Nous étions une équipe de quinze à vingt personnes — chercheurs, techniciens, étudiants gradués, plongeurs sous-marins et pilotes d’aéronefs — à travailler fort pendant six ou sept semaines par des températures en-dessous de zéro, de longues journées ensoleillées, des vents parfois très puissants et quelques blizzards étourdissants, le tout dans le but de faire avancer la science océanographique.

Au total, j’ai passé une vingtaine de mois à la baie James et à la baie d’Hudson, entre 1979 et 1987. J’ai travaillé sur le couvert de glace, en hiver, et sur les eaux libres des deux baies à bord de différentes embarcations, en été. J’ai aussi passé de nombreuses heures à bord d’hélicoptères et d’avions de brousse à survoler le territoire. J’ai arpenté près d’une dizaine de villages nordiques et côtoyé des Cris et des Inuits, ce qui m’a donné l’opportunité d’en apprendre un peu sur leurs traditions et leurs cultures respectives. J’ai eu la chance de voir des dizaines d’aurores boréales, d’observer de la bioluminescence dans les eaux marines et de voir surgir des fleurs là où la vie semblait impossible. Voilà tout ce que l’océanographie nordique m’a permis de découvrir et voilà pourquoi je garde des souvenirs impérissables de cette période de ma vie.

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