marche

Après être sortis de notre routine habituelle durant le temps des Fêtes, nous revoilà au début d’une autre année, bien disposés à prendre de bonnes résolutions pour ne pas retomber dans les tracas de la vie quotidienne. Mais on a beau s’être fait souhaiter « santé et sérénité » deux fois plutôt qu’une, on sait qu’il n’est pas facile de changer des habitudes de vie. D’où le sourire en coin inévitable quand on dévoile nos résolutions du nouvel an à nos proches...

Ne reculant devant aucun défi (!), j’aimerais pour ma part vous proposer une résolution tout à fait réalisable pour l’année qui vient. Quelque chose susceptible de vous apporter « santé et sérénité » et même plus. Non, ce n’est pas une pilule chère de Big Pharma. C’est même complètement gratuit et accessible en tout temps. Ça consiste à se lever de sa chaise, s’habiller si c’est l’hiver, et aller marcher un quart d’heure dehors ! Vous voulez une plus forte dose qui vous fera encore plus de bien ? Allez courir une demi-heure ou skier une heure ou deux ! Posologie recommandée : à chaque jour.

Bon, vous allez sans doute me dire qu’on le sait que l’exercice c’est bon pour la santé, que c’est pas vraiment un scoop ce que je vous raconte là. C’est vrai qu’on sait depuis des décennies que c’est bon pour le corps. Mais deux choses ont changé depuis dix ou vingt ans. D’abord à quel point le corps et le cerveau ne font qu’un, et donc ce qui fait du bien au corps fait forcément du bien au cerveau (voir tout mon cours de l’automne dernier si vous avez un doute !). Et d’autre part, parce qu’on ne savait pas que l’exercice pouvait À CE POINT être bénéfique pour notre santé mentale.

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En effet, on ne compte plus les études récentes qui commencent à décortiquer les mécanismes par lesquels le simple fait d’activer son corps met en branle des processus métaboliques qui améliorent les fonctions cognitives, affectives et même des troubles mentaux passablement lourds comme la dépression !

J’avais déjà parlé ici d’un mécanisme probable de l’effet anxiolytique de l’exercice par l’entremise des neurones au GABA de l’hippocampe. Voici que ce même neurotransmetteur inhibiteur, ainsi que son « opposant » excitateur le glutamate, sont au cœur d’une étude récente publiée en février dernier dans The Journal of Neuroscience. Richard Maddock et son équipe ont ainsi pu démontrer que l’exercice active les voies métaboliques qui produisent ces messagers chimiques dans notre cerveau, ce qui facilite la communication entre nos cellules nerveuses, les neurones.

Car il faut rappeler que certaines régions du cerveau des gens qui souffrent de dépression sont souvent caractérisées par une diminution importante de certains neurotransmetteurs. Et si une personne réussit à sortir de sa dépression, on observe une hausse concomitante de ces neurotransmetteurs cérébraux. D’où l’importance de cette découverte qui, en montrant que l'exercice augmente naturellement la production de ces neurotransmetteurs, vient ajouter une brique dans notre compréhension des mécanismes par lesquels l’exercice nous apporte un sentiment de bien-être. Sentiment qui, on le voit, a une base physiologique complexe et de mieux en mieux comprise. Si bien que des médecins peuvent maintenant prescrire de l’activité physique à leurs patients comme ils prescrivent un médicament. Cela ne veut évidemment pas dire que quelques marches peuvent sortir une personne de sa dépression. Mais beaucoup de marches peuvent probablement aider beaucoup de personnes…

En fait, on commence même à faire des nuances intéressantes entre les différents types et intensités d’exercice (l'étude de Maddock portait sur de l'exercice assez intense, mais de nombreuses études antérieures ont montré l'effet bénéfique d'exercices modérés). Et ce qui semble faire le plus de bien au cerveau sont les exercices « cardiovasculaires et soutenus ». Autrement dit, davantage les activités aérobies qui oxygènent tout notre corps que le travail musculaire ou l’entraînement par intervalles. De là à dire que l’abonnement au gym n’est peut-être pas le meilleur rapport qualité / prix comparé à n’importe quelle marche ou course dans le parc d’à côté, il n’y a qu’un pas… et un pas, c'est le début d'une marche... ;-P

Il y a enfin la neurogenèse, c’est-à-dire le développement de nouveaux neurones dans certaines parties de notre cerveau, qui bénéficie grandement de l’exercice physique. Là encore, on commence à entrevoir les mécanismes par lesquels bouger nos muscles de façon soutenue aide les connexions neuronales. Le neurobiologiste Pierre-Marie Lledo écrit par exemple, dans un article de septembre dernier intitulé Six règles pour régénérer son cerveau :

« Le quatrième principe consiste à lutter contre la sédentarité. Parce que la science nous dit qu’en cas d’activité physique, les muscles produisent des substances chimiques qu’on appelle les facteurs trophiques. Par voie sanguine, ceux-ci viennent agir sur le cerveau et en particulier sur la pouponnière, la fontaine de jouvence, et l’incitent à produire plus de neurones. Il existe une corrélation directe entre l’activité musculaire et la production de nouveaux neurones. Alors, choisissez la marche, plutôt que le métro ou la voiture. »

Sur ce, il est 11h je vais prendre ma marche quotidienne avant de mettre en ligne cet article. Dire qu’il y a encore quelques années, j’aurais continué jusqu’au lunch pour ne pas « perdre » vingt précieuses minutes. Quel cordonnier mal chaussé je faisais !

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