DDR-BananaBoat

L’écran solaire en vaporisateur de la marque Banana Boat peut-il brûler la peau des bébés et des enfants, comme l’ont relaté de nombreux articles de journaux depuis le mois de mai ? Même si plusieurs sont d’avis que le nombre élevé de plaintes à l’égard de ce produit constitue une preuve suffisante, il faut éviter d’en tirer des conclusions hasardeuses estime le Détecteur de rumeurs qui s’est penché sur ce sujet... brûlant.


Cet article fait partie de la rubrique du Détecteur de rumeurscliquez ici pour accéder aux autres textes.


L’origine de la rumeur  
 

En mai, Rebecca Cannon publiait sur sa page Facebook (la publication n’est plus accessible) des photos de sa fille de 14 mois qui aurait été brûlée au deuxième degré suite à l’application d’un écran solaire pour enfant en vaporisateur de la marque Banana Boat. Sur les photos qui accompagnaient cette publication, on voit sur le visage de la fillette des brûlures, des ampoules et des gonflements importants.

Abonnez-vous à notre infolettre!

Pour ne rien rater de l'actualité scientifique et tout savoir sur nos efforts pour lutter contre les fausses nouvelles et la désinformation!

Sa publication a rapidement fait le tour de la toile et donné lieu à de nombreux reportages. Dans la foulée de cette publication, des réactions similaires ont été signalées par d’autres parents sur les réseaux sociaux et suscité d’innombrables commentaires de parents inquiets.

Depuis mai 2017, Santé Canada a reçu plus de 200 plaintes relatives à différents écrans solaires de la même marque. Le ministère fédéral mène actuellement une enquête pour déterminer si ces produits sont la cause des réactions cutanées observées. Les conclusions seront publiées dans quelques semaines et plusieurs internautes se questionnent sur ce délai.

Un nombre élevé de plaintes ne constitue pas une preuve

Même si le dépôt de 202 rapports d’effets indésirables en deux mois peut sembler considérable, ce nombre ne constitue pas pour autant une preuve que l’écran solaire Banana Boat soit la cause des réactions cutanées observées par les parents. La grande médiatisation des cas de bébés « brûlés » a pu avoir un effet d'entraînement, portant davantage de parents à rapporter des réactions inhabituelles. « Les plaintes font état d’observations personnelles. Le rôle de Santé Canada est d’évaluer s’il y a un lien possible entre la formulation des produits et les réactions cutanées rapportées », souligne Sindy Souffront, conseillère en relations média pour Santé Canada. S’il s’avère qu’il y a un problème, les produits seront retirés du marché.

Il faut aussi mentionner que ces plaintes n’impliquent pas seulement le vaporisateur Banana Boat utilisé par Madame Cannon. « Les rapports d’effets indésirables soumis à Santé Canada couvrent une vaste gamme de produits Banana Boat, dont les lotions et les vaporisateurs », indique Sindy Souffront.

Des cosmétiques bien réglementés

Les écrans solaires ne sont pas des produits cosmétiques banals. Selon leurs ingrédients, les écrans solaires sont soit classés parmi les produits de santé naturels, soit parmi les produits pharmaceutiques. Par conséquent, ils sont réglementés par le ministère de la Santé du Canada qui s’assure de leur innocuité, de leur efficacité et de leur qualité.

Depuis le dépôt des plaintes et l’ouverture de l’enquête, l’entreprise Edgewell Personal Care Canada qui fabrique les produits Banana Boat, a remis au ministère les certificats d’analyse et les résultats de tests menés sur ses écrans solaires. Santé Canada a confirmé au Détecteur de rumeurs que ceux-ci sont bien conformes aux spécifications autorisées pour ces produits.

De plus, dans le cadre de son enquête, Santé Canada procède à l’analyse de la composition et des ingrédients présents dans chacun des écrans solaires pour lesquels une plainte a été reçue. Des tests en laboratoire sont effectués pour identifier et quantifier tous les ingrédients actifs et pour s’assurer que les produits testés satisfont à la règlementation. D’autres tests, tels que la détermination du niveau de pH et un examen général des échantillons, sont effectués. La complexité et la durée de ces tests de laboratoire sont variables, ce qui explique qu’il n’y ait pas de date exacte pour la remise des résultats.

Des tests essentiels pour déterminer la nature des lésions

« Les écrans solaires ne devraient pas causer de brûlure chimique, puisqu’ils ont un PH neutre, donc non irritant pour la peau. Mais s’il y avait un problème avec la composition du produit, certains ingrédients présents dans les écrans solaires pourraient irriter la peau ou causer une brûlure chimique », estime le dermatologue Ari Demirjian.

« Lorsqu’un produit irritant entre en contact avec la peau, elle peut devenir rouge, enfler et faire des cloques, comme celle des enfants sur les photos qui ont circulé. Le problème, c’est qu’un gros coup de soleil ou une allergie à un écran solaire peuvent également provoquer des réactions cutanées similaires, c’est pourquoi des tests sont essentiels pour déterminer la nature des lésions », explique le Dr Demirjian qui est porte-parole pour la semaine de prévention solaire pour l’Association canadienne de dermatologie.

Une allergie à l’écran solaire, c’est possible

Selon le spécialiste, tout écran solaire, peu importe la marque, peut provoquer une réaction allergique. « Cela est particulièrement vrai chez les jeunes enfants qui ont une peau très sensible », souligne-t-il.  « Les réactions allergiques peuvent être causées par différents ingrédients présents dans les écrans solaires. Le plus souvent, les gens réagissent aux benzophénones ou aux parfums. »

Les personnes qui ont eu des effets indésirables suite à l’application d’un écran solaire devraient donc passer des tests d’allergie ou encore se tourner vers des produits qui ne contiennent pas d’allergène. C’est le cas notamment des écrans solaires minéraux qui contiennent du dioxyde de titane et/ou de l’oxyde de zinc. Pour la peau sensible des bébés de plus de six mois et des enfants, le Dr. Ari Demirjian suggère d’ailleurs une protection minérale.

« Il ne faut pas avoir peur des écrans solaires. Leurs bénéfices dépassent largement les probabilités de présenter une réaction cutanée. C’est quelque chose qui arrive très rarement », rappelle le Dr Demirjian. « Les recommandations officielles restent les mêmes : on opte pour un écran solaire avec un FPS 30, on l’applique aux deux heures et on évite de s’exposer longtemps au soleil entre 10h et 14h. Le port de vêtements et d’un chapeau est également recommandé pour les jeunes enfants. »


Verdict : incertain

Dans l’attente des résultats de l’enquête menée par Santé Canada, il est impossible de conclure que l’écran solaire Banana Boat a causé ou non des brûlures chimiques. Les réactions cutanées pourraient aussi être dues à des causes non attribuables aux écrans solaires comme un coup de soleil ou encore à une réaction allergique à un ingrédient présent dans l’écran solaire.

Je donne