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Si je vous dis que je chauffe ma maison en laissant mon frigo ouvert et les ventilateurs tourner en permanence, j’aurai l’air d’être un peu fou, non ? Quel gaspillage d’énergie ! Et bien, en fait la majorité des maisons au Québec se chauffent avec un outil qui est aussi efficace que les systèmes proposés ci-dessus. En effet, les plinthes électriques transforment l’électricité en chaleur par l’effet Joule, mais toute forme de consommation d’électricité est transformée éventuellement en chaleur.

Vous savez probablement que la majorité de l’électricité utilisée au Québec provient de l’hydroélectricité, une source renouvelable avec de faibles émissions de gaz à effet de serre (GES) et relativement peu couteuse[1]. Dans ces conditions, ça ne devrait pas être un problème de « gaspiller » un peu d’électricité... Mais non, à court-terme, l’électricité non consommée peut être exportée à nos voisins, qui consomment en majorité des combustibles fossiles pour produire leur électricité, et, par conséquent, réduire leurs émissions. À moyen et long terme, nous aurons besoin de grandes quantités d’électricité pour réduire les GES au Québec. Pour lutter contre le changement climatique, il faut utiliser beaucoup moins de combustibles fossiles, et cela passe souvent par l’électrification des services fournis par ces combustibles. Ces questions et bien d’autres ont été traitées dans un article récemment publié dans le journal Applied Energy. L’article explore les transitions potentielles vers un Québec sobre en carbone et les coûts d’une telle transition.

La figure 1, résume les coûts potentiels de différentes transitions. Dans le scénario de référence, la réduction de 50 % des émissions de GES d’ici à 2050, engendrait une augmentation autour de 19 % des coûts de services énergétiques au Québec sur la même période de temps. L’utilisation de pompes à chaleur pour chauffer les ménages réduirait les coûts de la transition. En effet, les pompes à chaleur transfèrent la chaleur au lieu de la générer et s’avèrent entre 2 et 4 fois plus efficaces que les plinthes électriques. Un bon exemple est le campus de l’Université de Sherbrooke à Longueuil, chauffé et climatisé avec une pompe à chaleur géothermique. Une meilleure isolation des nouvelles maisons[2] (par exemple en suivant la certification NovoClimat) serait aussi une mesure efficace, car une fois le bâtiment construit, le changement d’isolation peut devenir très dispendieux.

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Cependant, la mesure la plus efficace pour réduire les émissions de GES reste de consommer de manière plus écoresponsable. Éviter la surconsommation, réduire la taille de nos maisons, privilégier le covoiturage, échanger nos VUS par de plus petites voitures ou encore réduire l’étalement urbain sont autant de mesures qui permettraient de réduire les émissions de GES et ce à faible coût. Pour ce scénario, nous avons utilisé des projections du Projet Trottier pour l’avenir énergétique.

 

[1] 165 TWh par année sont fournis aux Québécois par Hydro-Québec Production à un prix fixe de 2.79c $/kWh (Tarif patrimonial)

[2] Seulement évaluées pour les maisons unifamiliales. Les réductions en incluant tout type de bâtiment sont probablement beaucoup plus élevées.

Figure 1 : Coûts de réduction de GES au Québec (réduction de 50 % des GES pour 2050) selon différents scénarios (estimés comme les coûts additionnels par rapport au scénario sans réduction de GES).
Figure 1 : Coûts de réduction de GES au Québec (réduction de 50 % des GES pour 2050) selon différents scénarios (estimés comme les coûts additionnels par rapport au scénario sans réduction de GES).

L’exploration des scénarios peut aider à mieux comprendre les changements nécessaires et développer des plans pour leur mise en place. La prochaine étape de notre étude consiste à estimer les effets de la transition énergétique sur la santé et l’écosystème car il est fort possible que la réduction des émissions de GES ait d’autres effets positifs pour la société.

Maintenant, nous devons aussi nous questionner sur la meilleure manière de mettre en place cette transition. Le gouvernement a déjà établi des objectifs assez ambitieux, mais le Québec est loin d’être dans la bonne direction pour l’atteinte de ces objectifs. Les transitions ne sont pas évidentes et il y a toujours de la réticence au changement. Des évaluations techno-économiques comme la nôtre sont utiles mais insuffisantes, il faudra comprendre comment concilier des intérêts divers et avancer dans la transition énergétique. La prise en compte des perspectives des sciences sociales, de la société civile, des entreprises est importante… Comme premier pas, n’hésitez pas à nous laisser un commentaire ;).

Pour plus de détails sur cette étude vous pouvez accéder à la version en ligne de l’article ou nous envoyer un courriel (m.astudillo@usherbrooke.ca). Des commentaires constructifs et suggestions sont les bienvenus!

 

Miguel Fernández Astudillo, étudiant de doctorat (LIRIDE) à l'Université de Sherbrooke

 


[1] 165 TWh par année sont fournis aux Québécois par Hydro-Quebec Production à un prix fixe de 2.79c$/kWh (Tarif patrimonial)

[2] Seulement évaluées pour les maisons unifamiliales. Les réductions en incluant tout type de bâtiment sont probablement beaucoup plus élevées.

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