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Engins volants téléopérés à distance, les drones connaissent une popularité croissante dans le domaine militaire. Toutefois, la technologie employée à leur égard devient accessible à tous et l'essor de la mécatronique leur permet d'être sans cesse plus sophistiqués.

Cette série de billets s'intéressera donc à l'arrivée de plus en plus marquée des drones au sein des sociétés et des impacts qu'ils soulèvent. Plus particulièrement, une attention sera accordée aux enjeux éthiques et juridiques. Premier billet: regards sur leur utilisation et ses incidences face à la vie privée des citoyens.

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Apparus au moment de l'intervention américaine en Afghanistan, les drones ont d'abord été conçus pour améliorer la surveillance aérienne à distance. Leurs avantages en matière de coûts logistique et humains étaient indéniables. À ce point, que leur nombre est passé de 50 à 7500. Le tiers de la flotte d'aéronefs appartenant à l'Armée de l'air américaine est d'ailleurs composé de ces engins où aucun homme n'est requis à bord. Progrès technologique oblige, les drones deviennent de plus en plus sophistiqués et se distinguent de loin du petit hélicoptère téléguidé que l'on retrouve dans les rayons de jouets. Possédant certains senseurs (caméra haute définition à angles larges, GPS, WiFi, accéléromètre, etc.), ils peuvent se révéler particulièrement utiles dans différentes situations, telles : la surveillance des frontières par les douaniers, la recherche d'êtres humains lors de catastrophes, la photographies de bâtiments et même la prise de vidéos pour certains films.

À ce sujet, une équipe de recherche belge a commencé à se servir de drones pour surveiller certains animaux menacés en Afrique. Bien que l'autonomie de vol demeure limitée, l'avantage est certain au niveau du coût (tant de l'aéronef que de son carburant) et de la facilité des opérations à effectuer. Il est également possible d'utiliser ces drones dans n'importe quel environnement, ce qui les rend d'autant plus versatiles. D'ailleurs, Google a donné 5 millions de dollars à la World Wildlife Fund (WWF) pour l'acquisition de drones afin d'améliorer le monitoring d'espèces menacées.

Non seulement les animaux commencent-ils à être surveillés à distance, mais les humains n'y échappent pas non plus. Dans une liste dévoilée par l'Agence américaine responsable de l'aviation civile (FAA), plusieurs compagnies ont été autorisées à détenir des permis de vol de drones. Des corps de police se sont également manifestés. Le maire de Seattle a récemment mis fin au programme de surveillance par drones élaboré par la police municipales, suite aux pressions publiques effectuées notamment par l'Electronic Frontier Foundation. La principale raison invoquée était alors de pouvoir photographier les scènes de crime ou encore la surveillance du trafic, la recherche d'humains lors de catastrophes naturelles.

Malgré ces objectifs fort louables, la capacité d'installer des détecteurs thermiques par infrarouges et des caméras HD à angles larges risque de soulever d'autant plus l'indignation publique. L'autonomie de vol, sans cesse améliorée, permet également d'être pratiquement indéfinie grâce à un système de recharge au sol par lasers. La réponse face à ces craintes ne s'est donc pas fait attendre longtemps. L'État de Virginie a ainsi été l'un des premiers à réagir sur la question en adoptant une législation qui impose un moratoire complet sur toute utilisation de drones d'ici 2015. Quelques exceptions demeurent néanmoins permises, telles des opérations de sauvetage, en autant qu'elles soient exclusivement consacrées à la protection de la vie, de la santé ou des propriétés. De plus, certaines agences gouvernementales américaines n’hésitent pas à réquisitionner les Predators de l’armée pour leurs propres fins. Considérant que ces aéronefs peuvent facilement photographier des cibles minuscules à une altitude impressionnante, les questions face à l’utilisation visée ne peuvent qu’être importantes et préoccupantes. Il a déjà été rapporté notamment que des civils pakistanais développent de plus en plus de craintes face à cet espionnage constant.

C’est pourquoi certains appels se font plus pressants à l'égard du renforcement de la législation contre l'utilisation de drones. D'autres préfèrent invoquer les multiples avantages qui en découlent avant de strictement bannir le recours aux drones. Dans ce contexte où le recours aux lois et aux règlements semblent aller de soi, comment concevoir au Droit un tel rôle de protection? Il est clair que les enjeux soulevés sont loin d'être simples. Il n'est plus simplement question d'épier les individus grâce au recours d'Internet; leur présence est matériellement perceptible et risque fort d'en déranger certains. Inversement, cette matérialisation de la présence humaine désincarnée permet d’amener du secours dans les environnements hostiles ou encore de colliger des données qui autrement ne peuvent l’être. Faut-il effectivement bannir en définitive l’utilisation de drones dans un contexte civil? Bien que les nombreux exemples rapportés concernent davantage les craintes –et les «solutions» envisagées– de nos voisins sudistes, il ne faut pas se leurrer davantage: l’utilisation de drones se répand de plus en plus en Europe et au Moyen-Orient. Les questions soulevées risquent fort de nous concerner dans un avenir rapproché, compte tenu de la prolifération de leurs usages. Vu la diversité des impacts, tant positifs que négatifs, des différents enjeux soulevés et leur difficile pondération, une réflexion face à l’acceptabilité sociale d’une utilisation généralisée de ces aéronefs téléopérés se doit donc d’être amorcée.

– Charles-Étienne Daniel

Sources:

– http://opencanada.org/indepth/drone-week/

– http://www.time.com/time/magazine/article/0,9171,2135132,00.html

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