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Il y a des scientifiques qui acceptent d’affronter un créationniste, il faut bien qu’il y ait aussi des scientifiques qui acceptent d’affronter des climato-sceptiques. C’est l’exercice auquel s’était livré, il y a un an, peu avant sa mort, le climatologue américain Stephen Schneider.

La rencontre était organisée par l’émission australienne Insight : 52 climato-sceptiques dans l’audience, armés de leurs questions, face à Schneider —lequel était réputé depuis des années pour, justement, ses efforts pour jeter des ponts vers « l’autre camp ». C’est donc un vulgarisateur à son meilleur que cette émission nous présente (quoique diminué par la maladie qui allait l’emporter quelques semaines plus tard), et une belle leçon pour les scientifiques qui hésitent à s’impliquer dans les débats publics.

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Écouter cette émission est instructif pour deux raisons. D’abord, Schneider lui-même : il possède effectivement un talent pour vulgariser, dans ce cas-ci pour expliquer patiemment, en dépit d'arguments qu’il a dû entendre des milliers de fois : les climatologues seraient alarmistes puisque la Terre s’est toujours réchauffée et refroidie naturellement, les scientifiques ne parleraient de climat que pour faire de l’argent, les mesures de la température ne tiendraient soi-disant pas compte de la croissance urbaine, etc.

Écouter cette émission est également instructif pour observer les climato-sceptiques. Il suffit de regarder leurs visages (du moins, ceux que le montage a retenu) pour voir qu’ils ne veulent pas entendre. Leur opinion est déjà faite, quoi que puisse dire Schneider. Ils ont décidé qu’ils ne changeraient pas d’idée, avant d’avoir mis le pied dans le studio, même si leurs arguments respectifs devaient être démolis.

Je ne veux pas suggérer pour autant qu’il faille éviter ce type de dialogue. Au contraire. La présence de Stephen Schneider à cette émission vaut 1000 fois mieux que si, comme tant d’autres, il s’était enfermé dans son laboratoire en se faisant croire que la tempête allait s’arrêter d’elle-même.

Par contre, ça nous rappelle que ce « dialogue » ne doit pas être abordé comme un problème de déficit de connaissances (c'est-à-dire le grand savant qui, en distillant son savoir, va finir magiquement par leur faire voir la lumière). Plusieurs des membres de l’audience ne sont pas des ignorants. Loin de là. Et ils veulent parler, veulent échanger, veulent dialoguer. Les raisons de leur opposition sont à chercher beaucoup plus du côté de la psychologie, et c’est pourquoi la stratégie classique —si je les instruis, ils vont comprendre— échoue à tous les coups.

D’un autre côté, si la seule présence de Schneider a eu pour impact —impact psychologique, j’insiste— de leur faire prendre conscience qu’un scientifique sympathique, ça existe... eh bien oui, c’est déjà ça de gagné.

A lire aussi : Mes faits sont meilleurs que les tiens (un et deux)

(merci à Andrew Revkin pour avoir signalé cette émission)

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