
Le 4 novembre 2002

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Les grenouilles disséqués par un herbicide
(suite)
(Agence Science-Presse) - Difformités
et morts prématurées sont le lot des grenouilles
de partout dans le monde, depuis de trop nombreuses années.
Plusieurs des raisons en demeurent inconnues, et le mystère
vient de s'épaissir encore.
C'est qu'il y a six mois, un des coupables
avait été pointé du doigt: l'atrazine,
un des herbicides les plus utilisés aux États-Unis.
À faibles doses, apprenait-on, ce produit perturbe
le développement sexuel des grenouilles, au point
où les mâles se retrouvent avec des organes
propres aux femelles, ou avec un mélange des deux
(voir
ce texte). Or, voilà qu'une autre recherche vient
jeter une ombre sur la première: étudiant
une autre espèce de grenouille, le toxicologue James
Carr, de l'Université technique du Texas, affirme
qu'on ne peut blâmer l'atrazine.
La question est loin d'être anodine,
puisque l'atrazine, employé pour se débarrasser
des mauvaises herbes, est répandu depuis près
de quatre décennies dans une bonne partie des champs
(dont ceux de maïs) et des banlieues des Etats-Unis,
à raison de 27 000 tonnes par an. Quelque 80 pays
l'utilisent également; en revanche, certains n'ont
pas tardé à l'interdire, dont l'Allemagne,
la France et la Suisse, dès que des soupçons
ont commencé à peser sur lui, il y a quelques
années: on a découvert que l'atrazine avait
la capacité -théorique, à défaut
d'études plus poussées- de perturber les hormones
sexuelles. Et on sait par ailleurs qu'il en subsiste des
traces dans l'eau potable, ce qui n'a rien pour rassurer.
Accusations niées en bloc par son fabricant,
la compagnie suisse Syngenta. Parmi ses arguments: les problèmes
sexuels notés par la première étude,
celle du Dr Tyrone Hayes, de l'Université de Californie,
avaient déjà été observés
dans la nature, longtemps avant que l'atrazine ne soit commercialisé.
Le Dr James Carr emploie le même argument, et insiste
sur le fait qu'il n'a pas
pu reproduire les résultats auxquels était
parvenue l'équipe du Dr Hayes. Mais celle-ci n'a
pas attendu cette réponse, et après s'être
intéressée à des tétards africains
en laboratoire, dans sa première étude, vient
d'en publier une seconde, portant sur la grenouille-léopard,
étudiée dans son milieu naturel (lacs et étangs
des États-Unis). Là
aussi, difformités et morts prématurées.
L'Agence américaine de protection de
l'environnement (EPA) oursuit depuis 1999 une évaluation
de l'atrazine, afin de décider s'il doit être
banni ou long. Plusieurs commentaires recueillis ces derniers
jours par des journalistes qui relatent la seconde étude
Hayes montrent que bien des observateurs sont convaincus
que l'EPA subit des pressions de l'industrie pour ne pas
bannir cet herbicide.
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