
Le 23 décembre
2003

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Querelle de chiffres
(Agence Science-Presse) - Un étudiant
en mathématiques qui prétend avoir résolu
un mystère vieux de plus d'un siècle... et
une revue hyper-spécialisée qui, après
avoir publié ces résultats, se rétracte.
Le 24 novembre, la revue Nonlinear Analysis
croyait pourtant que son jour de gloire était arrivé:
les
médias parlaient d'elle! Elle venait de publier,
dans son édition Internet, un article qui, sous la
signature d'Elin Oxenhielm, étudiante au post-doctorat
en mathématiques à l'Université de
Stockholm, présentait une solution à la seconde
partie du 16e problème d'Hilbert.
Pour les incultes que nous sommes tous, précisons
qu'il s'agit de David Hilbert, mathématicien allemand
qui, en 1900, avait rédigé une liste de 23
problèmes, autant de défis posés aux
mathématiques du XXe siècle. Trois de ces
problèmes, dont ce numéro 16, restent encore
non-résolus aujourd'hui.
Or, mine de rien, ce 16e problème,
qui parle de la topologie des courbes et surfaces algébriques
-il doit bien y avoir deux ou trois de nos lecteurs qui
y comprennent quelque chose- est considéré
comme l'un des plus importants des mathématiques,
parce qu'il se situe sur le terrain où la géométrie
rencontre l'algèbre. La résolution de sa seconde
partie serait un grand pas vers la résolution du
reste, et la résolution du reste est à notre
portée d'ici un an, prédisait Oxenhielm. "Si
nous sommes chanceux."
Mais des mathématiciens sont aussitôt
montés aux barricades, alléguant que la résolution
proposée ne résolvait rien du tout. "Complètement
inadéquat; je ne peux pas imaginer que vous ayez
pensé qu'il s'agissait d'une preuve", a par exemple
déclaré John Mather, de l'Université
Princeton. Et comme quoi Oxenhielm n'était décidément
pas chanceuse, son propre superviseur, Yishao Zhou, ne l'a
pas appuyée: "l'article est incomplet et contient
de sérieuses erreurs".
Vous voulez en savoir plus encore? Voici l'explication
qu'en donne Nature. La seconde partie du problème
nécessite de démontrer "que le nombre de solutions
périodiques à une équation différentielle
est fini. De telles solutions périodiques sont aussi
appelées des cycles limites trajectoires stables,
oscillantes, vers lesquelles un système reviendra
s'il est perturbé. Les cycles limites sont courants
dans la nature, et une preuve de la seconde partie (du problème)
pourrait conduire à une meilleure compréhension
des battements de cur, des mouvements des animaux..."
Alors qu'est-ce qui cloche dans la démonstration
d'Oxenhielm. Seuls les dieux des mathématiques le
savent, mais ceux qui réfutent sa démonstration
sont catégoriques: "les solutions approximatives
fournies ne peuvent pas fournir les réponses exactes
requises pour une preuve", déclare dans Nature
Grigori Rozenblioum, de l'Université Chalmers
de technologie, à Gothenburg (Suède). Nonlinear
Analysis a retiré l'article le 4 décembre,
en attendant sa révision par un comité d'experts.
Le mystère des solutions périodiques à
une équation différentielle reste entier...
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