
Le 27 janvier 2004

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Ebola: on change de famille et on recommence
(Agence Science-Presse) - Comme si un virus
Ebola ne suffisait pas, voilà qu'on réalise
qu'il y en a plusieurs. Ou plus exactement, plusieurs familles,
avec chacune son histoire.
Il faut tout d'abord se rappeler que depuis
1995, une douzaine d'alertes ont été lancées
en Afrique centrale (Gabon, Congo, Zaïre, Ouganda),
chaque fois qu'une épidémie d'Ebola semble
resurgir chez des animaux ou chez l'humain. Et l'alerte
n'est pas lancée sans raison: même après
un quart de siècle (le virus a été
observé pour la première fois en 1976), cette
fièvre hémorragique tue jusqu'à 80%
des malades, et les médecins n'ont pas de traitement
-à part un bombardement massif d'antibiotiques.
Le plus récent cas s'est soldé
par au moins 29 morts entre octobre et décembre,
au Congo.
Mais le virus frappe tout aussi mortellement
les gorilles et les chimpanzés: des milliers pourraient
en être morts depuis cinq ans, selon des estimations
officieuses. Et c'est sur cette piste animale que s'est
lancée une équipe de chercheurs gabonais,
suisses et américains. Dans leur étude, parue
dans l'édition du 16 janvier de la revue Science,
ils écrivent que depuis 1976, les épidémies
humaines d'Ebola sont souvent précédées
d'une épidémie animale. Ce qui est une bonne
nouvelle: l'émergence du virus chez les humains devient
dès lors plus facile à prévoir. Mais
cette bonne nouvelle en contient une mauvaise: l'épidémie
ne provient pas toujours du même animal; il peut s'agir
aussi bien du chimpanzé que du gorille ou même
de l'antilope. Et chacun de ces animaux est porteur de sa
propre "famille" (ou souche) de l'Ebola, parfois de plus
d'une famille, et chacune de ces familles a ses propres
stratégies d'infection.
Autrement dit, les épidémies
recensées chez l'humain ont pour cause différentes
souches du même virus.
Les chercheurs, dirigés par Eric Leroy,
du Centre international de recherches médicales de
Franceville, au Gabon, ont identifié pas moins de
huit souches distinctes liées à cinq épidémies
humaines et animales survenues au Gabon et au Congo entre
2001 et 2003.
Faudrait-il aller jusqu'à conclure
qu'il n'y a non pas une épidémie d'Ebola en
cours, mais plusieurs? C'est ce que suggèrent les
auteurs, mais là-dessus, les opinions divergent.
Interrogé par Science, l'écologiste
américain Peter Walsh voit dans cette variété
des infections le résultat des mutations subies par
un et un seul virus au fil des années, au fur et
à mesure qu'il "saute" d'un animal à l'autre.
A ses yeux, la meilleure preuve que tout cela ne se résume
qu'à un seul virus est le fait qu'on n'a pas vu surgir
d'autres Ebola aux quatre coins de la planète: ce
virus est toujours resté cantonné à
l'Afrique centrale.
Cela étant dit, les chercheurs ne sont
guère plus avancés sur la voie d'un traitement.
Cette nouvelle étude révèle que le
virus est plus adaptable qu'on ne le croyait. Ce qu'il faut
à présent, c'est de trouver le "réservoir"
c'est-à-dire l'animal d'où est né cette
infection: il s'agit probablement d'un animal qui est porteur
du virus, sans pour autant en être affecté.
Comme les épidémies sont effectivement cantonnées
aux forêts humides d'Afrique centrale, ce réservoir
ne peut logiquement pas être loin.
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