Oublier avec une piqûre
(ASP) - Effacer le souvenir d'un traumatisme,
avec une simple piqûre? Certains croient qu'on s'approche
de ce moment, à mesure que s'accroissent nos connaissances
sur le fonctionnement du cerveau. Il y a deux ans, le
Dr Karim Nader, de l'Université McGill, démontrait
que chez un rat, un souvenir terrifiant réactivé
dans la partie extérieure de son cerveau, avait
été effacé par une piqûre d'anisomycine.
Aujourd'hui, il renchérit: le même processus
se produirait dans une autre partie du cerveau, l'hippocampe.
Dans une étude parue cet automne
dans la revue Neuron, on peut lire que des rats,
qui avaient été conditionnés (par
des chocs électriques sur les pattes) à
avoir peur de l'environnement où ils étaient
placés (par exemple, une boîte), ont permis
à Nader et à son collègue de l'Université
de New York, Joseph E. Ledoux, de démontrer que
chez ces rats, les souvenirs semblent être emmagasinés
dans les mêmes régions du cerveau que chez
les humains. De là à croire que ces souvenirs
pourraient être effacés ou réactivés
de la même façon chez eux que chez nous,
il n'y a qu'un pas...
"Les théories actuelles, explique
dans un communiqué le Dr Nader, attaché
au département de psychologie de McGill, avancent
que les souvenirs sont traités par le cerveau pour
commencer comme des souvenirs à court terme avant
d'y être stockés comme souvenirs à
long terme." Or, ses rats disent le contraire: "si vous
réactivez le souvenir terrifiant et que vous empêchez
la production des protéines" (protéines
dont on sait qu'elles servent à "fixer" ou "reconsolider"
ces souvenirs), le souvenir se perd.
Ce qui pourrait en même temps expliquer
pourquoi les souvenirs peuvent être aussi facilement
altérés: vous êtes témoin d'un
accident, et vous entendez quelqu'un parler de la victime
à la veste rouge. Vous vous souviendrez de la veste
rouge, même s'il n'y en avait aucune sur le lieu
de l'accicent! C'est ce qu'on appelle la mémoire
induite, et on sait maintenant, biologiquement, comment
ça marche.