Les Grands Lacs et le Saint-Laurent
sont-ils en crise?
(ASP) - En 1986, les niveaux élevés
des eaux des Grands Lacs inquiétaient la Commission
mixte internationale (CMI) qui gère les eaux
transfrontalières Canada/États-Unis. Depuis
1997, on assiste au phénomène inverse:
le niveau des eaux est plus bas quil ne la
jamais été depuis 100 ans!
Mieux comprendre ce phénomène
est important, parce que les enjeux sont nombreux. "Dans
les années à venir, il y aura de plus
en plus de pression sur les écosystèmes
des Grands Lacs. Laugmentation de la population,
le développement économique et les changements
climatiques vont tous affecter ce bassin", expliquait
Murray Clamen de la CMI, au congrès Américana
2001.
Sil y a moins deau en effet,
les poissons sen ressentent, la flore aquatique
dépérit, les animaux sont touchés,
etc. Pour les humains, la vente deau potable devient
problématique, surtout si les niveaux deau
sont déjà trop bas pour supporter les
écosystèmes. "Lexportation,
la consommation, lutilisation et la bifurcation
des sources deau vers de nouvelles destinations
soulèvent des peurs", confirme M. Clamen.
Sans oublier les produits toxiques persistants,
laccumulation des débris organiques sur
les berges, les espèces étrangères
plus résistantes, qui réussissent parfois
à prendre la place des espèces "locales"
affaiblies, etc. " Nous connaissons mal les
effets cumulatifs des ces paramètres."
Alors, le plus grand bassin deau
douce au monde est-il en crise? Curieusement, malgré
son exposé peu reluisant, M. Clamen répond:
"non et oui. Non, parce que nous ne partons pas
de zéro. Nous avons des traités avec nos
voisins du Sud, nous avons des tonnes dinformations
scientifiques, de nombreux rapports, des recommandations,
et nous avons la CMI... Oui, parce que nous avons besoin
dun plan de gestion durgence, nous manquons
de budgets et dexpertises, les effets cumulatifs
sont mal évalués et il y aura toujours
des imprévus."
Globalement, dit-il, il ny a pas
de crise. Il admet tout de même se sentir préoccupé
par les changements climatiques. "Nous navons
pas encore bien évalué les impacts quauront
les changements climatiques sur ce bassin. Il risque
dy avoir des conflits entre les utilisateurs et
il y aura des variations de débits." Cela
signifie des revendications de la part des riverains,
des industriels, des navigateurs, des touristes, des
centrales hydroélectriques et des écologistes,
mais aussi des impacts visibles sur les berges, la navigation
et la disponibilité de leau.
N'est-ce pas suffisant pour s'inquiéter,
semblaient se demander l'auditoire, un peu surpris par
ces propos un brin optimistes?
Rappelons que le Groupe intergouvernemental
sur lévolution du climat (GIEC), qui relève
des Nations Unies, a pondu il y a quelques semaines
une série de scénarios d'avenir, dont
la plupart prévoient que le niveau deau
et le débit du Saint-Laurent et des Grands Lacs
seront à la baisse dans le siècle qui
samorce.