L'ordinateur quantique:
un rêve encore lointain
(ASP) - Les lois qui régissent le
monde microscopique, celles de la mécanique quantique,
sont parmi les plus abstraites et contre-intuitives qui
soient. Une de leurs conséquences, lintrication
quantique, est une propriété tellement
étrange quEinstein lui-même navait
pu y croire : il en a déduit que la mécanique
quantique devait être soit incomplète, soit
fausse. Eh bien, cette propriété est aujourdhui
la clé du fonctionnement des futurs ordinateurs
quantiques, qui pourraient concrétiser les rêves
les plus fous en matière de performance.
Rappelons que les ordinateurs classiques
fonctionnent sur le principe d'une porte ouverte ou fermée:
un 0 ou un 1. Chacune de ces unités est un bit.
Mais leur équivalent quantique, le qbit, peut prendre
plusieurs valeurs en même temps puisquil peut
être dans plusieurs " états "
en même temps, grâce aux lois
étranges qui gouvernent ce monde.*
Résultat : 2 qbits peuvent
exprimer ce quexpriment 4 bits, 10 qbits, 210
bits et 300 qbits... autant de bits quil y a datomes
dans lunivers!
Et à 300 qbits, on est loin des
millions de qbits que pourrait contenir un ordinateur
quantique. Résultat, un message que l'ordinateur
actuel le plus puissant mettrait qui 15 milliards dannées
à décoder, pourrait être lu en quelques
semaines ou quelques mois par un ordinateur quantique!
C'est pour quand?
Mais il ny a pas lieu dêtre
inquiet pour votre numéro de carte de crédit
qui circule sur Internet, puisque ce nest pas pour
demain!
Car une des premières questions
auxquelles il faudra répondre et sur lesquelles
travaillent les laboratoires du monde entier, c'est: de
quoi seront faits ces qbits? De photons? De matériaux
supraconducteurs? Seront-ils conçus grâce
à des techniques dimagerie médicale?
Le candidat retenu sera celui qui sera capable de conserver
son information suffisamment longtemps pour que lon
puisse lutiliser lors de calculs. Il devra également
être manipulable et lisible. Selon certains, la
voie la plus prometteuse est celle des supraconducteurs,
entre autres parce que ce type de qbits est soumis aux
lois quantiques mais est également assez gros pour
être manipulé. C'est la voie qu'explore,
entre autres chercheurs, Alexandre Blais, de l'Université
de Sherbrooke.
Une fois le transistor du futur mis au
point, il restera la tâche imprévisible de
lassemblage. Ces ordinateurs quantiques seraient
capables certes de traiter des quantités phénoménales
d'information, mais leur utilisation nécessiterait
également la conception de logiciels hautement
complexes, impliquant la nécessité de jongler
avec les multiples états simultanés des
qbits. Au point que, pour le moment, on ne connaît
que très peu de situations où de tels avantages
seraient mis à profit: des recherches scientifiques
sans doute, notamment en pharmacologie, nécessitant
le brassage de quantités astronomiques de données.
Du côté du simple citoyen, on laissera certainement
le traitement de texte aux ordinateurs classiques qui
le font déjà très bien...
Le Québec ne risque pas de manquer
le train dans cet avènement, avec des noms respectés
comme Gilles Brassard un des pères de linformatique
quantique Raymond Laflamme, Claude Crépeau,
Patrick Hayden, Aashish Clerk, Alexandre Blais et bien
dautres.
* En plusieurs endroits
en même temps??? Eh bien oui. C'est le paradoxe
exprimé par le physicien Erwin Schrödinger,
connu sous le nom du "chat de Schrödinger. Imaginons,
a-t-il dit, une boîte fermée, à l'intérieur
de laquelle se trouve un chat et une capsule contenant
un gaz mortel. Il y a une chance sur deux pour que la
capsule ne tombe et que le gaz qu'elle contient fasse
mourir le chat. Le chat est donc soit mort, soit vivant:
il ne peut évidemment pas être les deux à
la fois. Mais s'il était une particule quantique,
tant qu'on n'a pas ouvert la boîte et déterminé
son état, il serait, aussi contre-intuitif que
cela semble, l'un et l'autre.
Binh An Vu Van