Le souffle de la mer
(ASP) - L'océan respire, lui aussi.
Comme nous, il évacue du gaz carbonique qui s'en
va grossir la quantité qu'on retrouve ensuite dans
l'atmosphère. En fait, selon une hypothèse
récente et qui demeure encore controversée
la respiration océanique pourrait être la
source principale du CO2 présent sur notre planète.
Si cette hypothèse demeure controversée,
c'est parce que la vision traditionnelle suppose plutôt
qu'il existe un équilibre parfait dans ce cycle
du carbone océanique: entre la photosynthèse
d'un côté et la décomposition de la
matière organique de l'autre, année après
année, subsisterait un équilibre presque
parfait la perte, sous la forme de matière
organique, allant se perdre au plus profond du sous-sol
océanique. Mais le portrait que suggère
Paul del Giorgio, du département des sciences biologiques
de l'Université du Québec à Montréal,
est différent: la respiration des plantes aquatiques
produirait un surplus par rapport à la photosynthèse
des algues, surplus qui se manifeste par l'envoi de CO2
dans l'atmosphère. Cette hypothèse, mise
de l'avant dès 1997 avec Carlos Duarte, de l'Institut
méditerranéen d'études avancées
à Majorque (Espagne), a fait l'objet, plus
tôt cette année, d'une version remise à
jour, dans la revue britannique Nature.
Ce que les chercheurs ajoutent à
leur théorie, c'est, pour la première fois,
une estimation mathématique de ce que représente
cette "respiration", en s'appuyant pour cela
sur une synthèse d'études menées
par d'autres qu'eux, ces dernières années,
aux quatre coins des mers, en surface aussi bien qu'aux
plus grandes profondeurs. Et de leurs calculs il ressort
ce qui risque aussi de créer la controverse
que près de la moitié de cette respiration
se produit non pas en surface, là où dorment
pourtant les plantes aquatiques, mais dans les couches
les plus profondes de l'océan, là où
ne pénètre même pas la lumière
du soleil là où il n'y a donc même
pas de photosynthèse pour amorcer le cycle.
Si cette hypothèse devait se révéler
juste, autrement dit si une aussi importante partie de
l'apport de CO2 provient vraiment des couches profondes
de l'océan, alors cela obligera les climatologues
à ajouter à leurs calculs un apport en CO2
qu'ils n'avaient jamais calculé auparavant. Et
au passage, à jeter par terre l'image, peut-être
trop belle pour être vraie, d'un océan parfaitement
équilibré.