Fondamentalisme et républicains:
Apocalypse Now!
(ASP) - Aux États-Unis, on assiste
à un véritable boom du phénomène
religieux, et ce phénomène ébranle
jusqu'aux relations internationales: les discours du Parti
républicain renferment depuis le 11 septembre 2001,
et plus encore avec la guerre en Irak, des références
messianiques, voire apocalyptiques. C'est du moins l'hypothèse
qu'un jeune chercheur est venu présenter lors du
colloque sur la mondialisation du phénomène
religieux présenté au cours du 71e
congrès de l'ACFAS, à Rimouski.
C'est à l'Université Fordham
de New York que Martin Geoffroy effectue présentement
une vaste recherche post-doctorale sur le fondamentalisme
protestant et l'intégrisme catholique en Amérique
du Nord. Un des volets porte plus précisément
sur les liens avec le Parti républicain: selon
le chercheur, on observe aux États-Unis un renouveau
du protestantisme conservateur (parallèlement à
un déclin du protestantisme plus libéral),
renouveau qui se manifeste notamment par certaines alliances
entre le Parti républicain et les néo-évangélistes
américains.
Billy Graham par exemple, à la tête
de la National Association of Evangelicals, obtient présentement
une oreille plus qu'attentive de la part du président
George W. Bush, souligne le sociologue. L'Association,
fondée dans les années 40, est au cur
de la réorientation du mouvement fondamentaliste
américain. Michael Gerson, l'actuel rédacteur
des discours présidentiels, est un fondamentaliste
convaincu et ce resserrement des liens entre le fondamentalisme
religieux et la politique déteint effectivement
sur le discours politique.
Par exemple, le discours de la victoire
en Irak prononcé le 1er mai.
On se rappelle que c'est dans une mise en scène
évocatrice que le président Bush, revêtu
d'une combinaison de pilote, est "descendu du ciel"
à bord d'un jet Viking qui s'est posé sur
le porte-avion Abraham Lincoln. À cette occasion,
George W. Bush a terminé son discours par ces paroles:
"Dans les mots du prophète Isaïe,
aux captifs: "Sortez", et à ceux qui sont dans
les ténèbres: "Soyez libre". Merci de servir
notre pays et notre cause."
Voilà un exemple, pour Martin Geoffroy,
de propos de nature messianique. L'usage de cette citation
du prophète Isaïe n'est pas fortuit: c'est
ce prophète qui dans la Bible annonce la chute
de Babylone et incite le peuple à n'accorder sa
confiance qu'en Dieu.
Aujourd'hui, le président Bush rassemble
les "fidèles" et les implore à
son tour d'accorder leur foi à Dieu. "La
liberté que nous chérissons n'est pas le
cadeau de l'Amérique au monde, c'est le cadeau
de Dieu à l'humanité... Nous ne prétendons
pas connaître toutes les voies de la Providence,
mais nous pouvons lui faire confiance, placer notre confiance
en un Dieu d'amour au-delà de toute vie et de toute
l'Histoire. Puisse-t-Il nous guider", clamait-il
lors de son discours sur l'état de de l'Union,
le 29 janvier.
En récupérant tout le discours
religieux, le Parti républicain est en train de
le pervertir au profit d'un "néo-évangélisme
patriotique". Et le danger, conclut le sociologue, c'est
que personne n'ose remettre en question ce discours, de
peur d'être accusé d'antipatriotisme.
Geneviève Bougie