L'avenir des OGM n'est pas menacé
(ASP) - "Lavenir des OGM nest
nullement menacé": les chercheurs et industriels
semblent daccord sur ce point. On aurait pourtant
pu croire le contraire, après le tollé anti-OGM
des trois dernières années, qui avait entre
autres conduit, en 1999, le géant de l'alimentation
McCain à retirer des tablettes ses frites surgelées.
Ne sont-ils pas exagérément optimistes?
Quen est-il réellement des OGM à
présent ?
Sous le thème "Nourrir le monde",
le 5e forum international BioAgroContact
réunissait du 21 au 23 octobre, à Québec,
des chercheurs, des industriels et des gens daffaires,
dans le domaine des biotechnologies de l'agroalimentaire.
BioAgroContact était organisé par la Société
de promotion économique du Québec métropolitain.
"Le potentiel de génie génétique
des cultures et des produits est énorme",
affirme Hubert George Zandstra, directeur général
du Centre international de la pomme de terre au Pérou,
reconnu internationalement pour son expertise agricole
en transfert technologique. À lheure où
"Nourrir le monde" est une préoccupation
sérieuse dans les pays du Tiers-monde, la génétique
et les nouvelles technologies apportent un peu despoir
et doivent être mises à profit au maximum,
dit-il, pour satisfaire aux besoins alimentaires et économiques
des pays en voie de développement.
Mais la résistance du public, dans
les pays du Nord, ne risque-t-elle pas de mettre un frein
à ces recherches? Pour les chercheurs et les industriels,
il est évident que le public sinquiète
quand il sagit dalimentation. Et quant aux
investisseurs et aux chercheurs, ils sinquiètent
bel et bien de lopinion publique; pour une entreprise,
cela représente des risques financiers et pour
le chercheur, dont les projets doivent être soumis
par différentes grilles dapprobation, cela
représente de longs investissments en temps et
efforts.
"Les OGM ont un avenir et les consommateurs
sont mal informés", juge Benoît Lebeau,
de Atlangene America. Cette jeune compagnie française,
qui vient juste de sinstaller au Québec,
offre des services danalyse de traçabilité
des produits OGM, depuis la semence jusqu'à lassiette.
Il veut pour preuve de cette mauvaise information le fait
que lopinion sinquiète quand il sagit
dalimentaire, mais pas lorsquil sagit
dapplications médicales. Pourtant, fait remarquer
Muriel Subirade, chercheure au département des
science et technologie des aliments de lUniversité
Laval, "ça passe par le même endroit".
En parallèle, une étude présentée
à BioAgroContact et menée par lInstitut
des aliments fonctionnels de lUniversité
Laval, montre que 58% des consommateurs sont prêts
à acheter au moins un produit OGM, et que 50% feraient
un achat daliments fonctionnels. Or, un aliment
fonctionnel est un produit qui n'a pas été
manipulé génétiquement, mais enrichi
soit en vitamine, soit en gras. Les OGM susciteraient
donc moins de méfiance que les aliments fonctionnels!
Le problème nest pas simple,
surtout quand on le double d'une curiosité historique:
le développement génétique est apparu
suite à des mesures de protection de lenvironnement
contre la montée des pesticides et insecticides.
Si la machine se retourne contre la génétique,
vers quoi se dirigera-t-on? Peut-être vers un nouveau
tournant pour les biotechnologies. Après une 1ere
génération dOGM axée sur une
meilleure résistance aux insectes et à lenvironnement,
et une 2e génération
qui augmente les valeurs nutritives des produits agricoles,
une 3e génération a déjà fait
ses premiers pas: les molécultures.
De quoi s'agit-il? De cultures de végétaux
ou d'animaux qui, au lieu d'être utilisées
comme usines à aliments, sont utilisées
à des fins industrielles (surtout dans le domaine
médical, pour l'instant). Par exemple, dans la
région de Québec, Médicago inc. utilise
la luzerne comme "usine à hémoglobine",
et TGN Biotech développe une plate-forme technologique
sur les protéines recombinantes, à partir
danimaux transgéniques, comme linsuline
humaine à partir de porc.
D'où l'optimisme des industriels.
L'avenir des OGM n'est pas menacé
bien que
pour l'instant, son avenir strictement dans les assiettes
des consommateurs ne soit pas brillant.
Anne Nabet