Bien manger ou manger bien: une affaire
de goût
(ASP) - Qu'est-ce qui détermine le
bon goût de ce que nous mangeons? Rude question.
"Il est aussi difficile de définir la qualité
sensorielle dun produit que de décrire un
visage humain", explique Jacinthe Fortin, analyste
en évaluation sensorielle au Centre de recherche
et de développement sur les aliments.
Cette experte intervenait à latelier
sur "Le goût : Tout risquer... ou ne rien
manger?", à loccasion du forum Science
et société qui avait lieu du 2 au 4 novembre
au cégep de Limoilou à Charlesbourg.
Ainsi, au-delà du débat classique
sur le possible danger des OGM, il y en a eu un plus riche
en
saveurs. Le dilemme culturel franco-québécois
entre les produits du terroir, que lon pourrait
apparenter à des produits "bio" et les
produits synthétiques.
Alors que les produits du terroir sont complexes
à analyser et, selon Claude Champagne du ministère
de lagriculture et de lagroalimentaire, "il
vaut mieux pas !", les produits synthétiques
sont stables et offrent un contrôle et une sécurité
accrus au niveau santé. Par contre, aux dépens
de la saveur. Le forum Science et Société
regroupait quelque 220 jeunes de 18 à 25 ans et
des chercheurs du Québec et de France.
"Côté sécurité
alimentaire, jusquoù les études ont-elles
été faites?" Il y a deux aspects :
dun côté, il faut des réponses
très rapides. On peut reproduire 1000 ans de microbiologie
en laboratoire. De lautre côté, les
études se font à court terme: le temps dune
subvention (2 à 3 ans). Autre fait curieux: la
listériose, bactérie que lon retrouve
dans les charcuteries et fromages du terroir, atteint
chaque année 200 personnes. Et personne ne sen
inquiète autant que des trois rumeurs de maladie
de Creuztfeld Jakob.
Alors que les produits traditionnels ont
traversé les générations, ils sont
à présent souvent en butte contre la réglementation.
À titre dexemple, "la conservation dans
le gras ne convient plus avec les appartements surchauffés,
il faut donc stériliser", fait remarquer Jean-Didier
Vincent, neurobiologiste et directeur de lInstitut
Alfred Pessard à Paris. De même le glutamate
monosodique, tant utilisé comme réhausseur
de goût, par les Asiatiques nest pas vraiment
apprécié par ici. Pourtant, "le glutamate
est le premier neurotransmetteur du cerveau", ajoute
Jean-Didier Vincent.
En somme, le portrait de lassiette
est moyennement appétissant: dun côté
les produits classiques et normalisés font peur
à cause des OGM et offrent jusqu'à présent
peu de satisfaction auprès du consommateur. De
lautre côté, les produits traditionnels
sont moins sécuritaires.
Alors que reste-t-il comme choix pour le
consommateur entre bien manger et manger bien? "Il
y a de la place pour les deux", affirme Jacinthe
Fortin. Et peut-être ne pas oublier que le goût,
cest aussi lanticipation du plaisir. Bon appétit.