Les crustacés contre les eaux
usées
(ASP) - Une substance biodégradable
produite par les crustacés pourrait servir à
traiter
les eaux usées. Et une compagnie
de la Gaspésie, justement spécialisée
dans la transformation des crevettes, pourrait ainsi se
"recycler".
La compagnie en question, les pêcheries
Marinard Ltée, une compagnie ancrée dans
le village de Rivière-au-Renard, s'était
dotée en 1996 dun laboratoire de recherche.
Cela lui a permis de contrôler toutes les étapes
de purification en vue de l'obtention de la substance
recherchée: le chitosane.
Le chitosane est une fibre biodégradable
dorigine naturelle obtenue à partir de la
chitine, un important constituant de la carapace des crustacés.
Elle représente le deuxième polymère
naturel en abondance sur la terre, après la cellulose.
Or, depuis quelques années, les applications
du chitosane se sont multipliées. On lui a trouvé
une place dans le secteur biomédical, lorsqu'on
s'est aperçu qu'il avait entre autres un effet
bénéfique sur le contrôle du cholestérol
sanguin. On le retrouve aussi dans la constitution de
certaines peaux artificielles ou de fils chirurgicaux
biodégradables. Dans le secteur alimentaire, il
est devenu additif ou conservateur. Il est aussi présent
dans la structure de certains papiers et textiles.
Mais son application la plus récente,
en Amérique du Nord, se situe dans le traitement
des eaux usées. Marinard Biotech, en partenariat
avec le groupe Axeau et la ville de Gaspé, a mis
sur pied un projet-pilote pour un investissement de 591
000 $, dont 400 000 $ sont octroyés par le Fonds
daction québécois pour le développement
durable. Le président de Marinard Biotech, Clermont
Beaulieu, mise sur les propriétés anti-odeur
et anti-bactériennes du chitosane, ainsi que sur
sa capacité à amalgamer des particules en
suspension. Son efficacité serait plus grande que
celle des produits chimiques traditionnels.
En éliminant les produits chimiques,
le chitosane contribue aussi à la préservation
de lenvironnement. Il permet par exemple de récupérer
les boues et de les utiliser comme fertilisants, au lieu
de les enfouir.
Ce procédé est déjà
employé dans la moitié des cas, dans le
traitement des eaux usées au Japon, et dans des
proportions variables dans le reste de l'Asie. Mais en
Amérique du Nord, il est pour ainsi dire absent.
Grâce à ce projet qui a débuté
au mois de septembre 2001 et qui sétalera
sur 18 mois, il sera pour la première fois possible
de faire un choix entre le traitement physicochimique
traditionnel -qui reste pour linstant moins onéreux-
et le traitement par le chitosane, qui serait davantage
adapté aux nouvelles normes sur la qualité
de l'eau et la protection de l'environnement -et qui ne
nécessiterait aucun ajustement aux structures de
la plupart des usines de traitement des eaux du Québec.
Philippe Jourdin