Faux comme diamants
du Canada
(ASP) - Larchéologie permet
de faire avancer une enquête vieille de plus de
400 ans, à propos dun des plus grands scandales
miniers de lhistoire du Canada, au moins aussi important
que celui provoqué par la firme albertaine Bre-X
à la fin des années 1990.
Dans les deux cas, il est question dor,
danalyses douteuses déchantillons de
minerai et de pertes colossales pour les investisseurs.
En 1576, au retour dune mission dont le but était
de trouver un passage vers la Chine, un membre de léquipage
de l'explorateur Martin Frobisher croit que le minerai
rapporté de la Terre de Baffin contient de lor.
À Londres, des analyses sont immédiatement
réalisées sur le minerai. Malgré
des résultats contradictoires, Michael Lok, un
marchand qui était du voyage, convainc des investisseurs,
dont la reine Elizabeth 1, de financer dautres voyages
vers cet Eldorado nordique.
Les deux expéditions suivantes seront
des échecs complets : on ne trouvera pas dor,
un procès aura lieu et Lok se retrouvera en prison.
Y a-t-il eu fraude? Plusieurs le croient.
Mais il existait une autre hypothèse que l'archéologue
Réginald Auger et le géologue Georges Beaudoin,
de l'Université Laval, ont voulu tester. À
lépoque, pour déterminer si du minerai
contenait de lor, on le faisait fondre dans un creuset
qui contenait une pastille de plomb. Les métaux
précieux se détachaient alors de leur matrice
pour samalgamer avec le plomb. On séparait
à nouveau cet amalgame pour obtenir les métaux
précieux.
À partir de billes de plomb trouvées
lors de fouilles archéologiques menées par
M. Auger sur lîle de Kodlunarn (Terre de Baffin),
les chercheurs ont voulu vérifier si le plomb utilisé
par les Anglais avait pu être accidentellement " contaminé "
par lor. Ils nont trouvé que des quantités
infimes dor, alors que " les analyses
de Londres donnaient des teneurs 10 000, même 100
000 fois plus élevées, explique M. Beaudoin.
À ces niveaux, lor aurait été
visible à loeil nu dans le minerai ".
Ainsi, pour M. Auger, " tout indique
quil sagissait dune fraude. Il est difficile
de dire qui la commise et pourquoi, mais il est
très peu probable que le plomb ait été
accidentellement contaminé à lor ".
On ne pourra peut-être jamais affirmer
avec certitude quil y a eu fraude. Mais lappétit
insatiable des Européens du XVIe
siècle pour les richesses du Nouveau Monde en a
conduit plus dun à agir de manière
irrationnelle, comme Jacques Cartier qui, 34 ans plus
tôt, croyant avoir trouvé de lor et
des diamants, avait désobéi à son
supérieur Roberval pour ramener en France de la
pyrite de fer et du quartz...