L'enthousiasme manifesté à la fin de la Conférence des Nations Unies sur les changements climatiques, en décembre 2006, était-il prématuré ? Cinq mois plus tard, la position de blocage des Etats-Unis semble plus solide que jamais... et les objectifs de Kyoto plus éloignés que jamais.

Le Canada ne se contente plus, depuis l’élection du gouvernement conservateur en janvier, de se montrer sceptique face à l’utilité du Protocole de Kyoto. Voilà qu’il flirte carrément avec le Partenariat Asie-Pacifique, ce traité qualifié l’an dernier " d’anti-Kyoto ", parce qu’il ne propose aucune mesure contraignante pour la réduction des gaz à effet de serre –et parce qu’il émane des Etats-Unis et de l’Australie, deux pays qui ont refusé de signer Kyoto.

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Sentant la soupe chaude, les groupes écologistes sont passés à l’attaque en fin de semaine : ils accusent le gouvernement canadien d’avoir calqué son discours anti-Kyoto sur celui de la Maison-Blanche et annoncent que la ministre canadienne de l’Environnement, Rona Ambrose, qui préside cette semaine, à Bonn (Allemagne) une rencontre des Nations Unies, est surveillée de près.

D’un autre côté, cette controverse donne peut-être à cette rencontre de Bonn une importance démesurée dans les médias canadiens : il ne s’agit que d’une étape technique entre la grande conférence de Montréal, en décembre dernier (voir notre dossier), et celle de Nairobi, Kenya, en novembre prochain.

Les ministres –signataires et non-signataires de Kyoto– se réunissent pendant deux jours à Bonn pour un " dialogue " (les pays du Sud en profitent notamment pour demander à ceux du Nord de faire davantage d’efforts), mais le groupe de travail sur le Protocole de Kyoto, lui, poursuit ensuite ses travaux pendant 10 jours : c’est là qu’aura lieu le véritable travail.

Ceci dit, les signaux d’alerte sont bien réels, et ils ne sont pas uniquement le fait du nouveau gouvernement conservateur. Le Canada émet effectivement 35% de plus de gaz à effet de serre qu’en 1990, ce qui rend l’objectif fixé par Kyoto, en 2012, presque utopique.

Outre-Atlantique, le 30 octobre dernier, le premier ministre britannique Tony Blair –pourtant un signataire de Kyoto– avait lui aussi émis des doutes sur l’utilité de Kyoto : sans la Chine, l’Inde et les Etats-Unis, avait-il déclaré au quotidien The Observer, une entente planétaire sur la réduction des gaz à effet de serre a peu de sens.

Toute future entente, avait-il ajouté, devra inévitablement inclure les Etats-Unis.

Une entente moins contraignante que Kyoto

Lorsque la ministre canadienne Rona Ambrose déclare, le 15 mai à Bonn, que Kyoto devra, après 2012, " être adouci ", elle dit donc, somme toute, la même chose que Tony Blair le 30 octobre.

Et c’est là qu’entre en jeu le Partenariat Asie-Pacifique tant décrié par les écologistes : car la future entente, celle qui doit déterminer ce qui se passera après 2012, cela pourrait être celle que politiciens et experts ont commencé à mettre en place à Montréal en décembre dernier.

Mais ça pourrait être aussi, celle, beaucoup moins contraignante, que les Etats-Unis proposent avec leur Partenariat Asie-Pacifique.

Si le Canada se joignait à ce Partenariat, la chose aurait une immense valeur symbolique pour tous les partisans " mous " de Kyoto : ils pourraient demeurer signataires de Kyoto, tout en adhérant à un avenir complètement différent.

En d’autres termes, ils abandonneraient Kyoto, sans dire ouvertement qu’ils abandonnent Kyoto.

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