La semaine dernière, une compagnie annonçait une importante percée dans la maîtrise des cellules-souches. À présent, la compagnie doit s’excuser pour avoir laissé planer l’impression que sa percée était plus importante que ce qu'elle était réellement.

Aux yeux du profane, la différence est subtile: dans un article publié par la revue Nature, la compagnie américaine Advanced Cell Technology décrivait le succès d’une nouvelle méthode pour générer des lignées de cellules-souches à partir d’une cellule prélevée sur un embryon arrivé au stade de seulement huit cellules (plutôt qu’une centaine de cellules). Jusque là, tout est exact.

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Là où il y a problème, c’est que la description de la nouvelle technique laissait l’impression qu’aucun embryon n’avait été "endommagé" dans le processus; c’est même sur cet élément que plusieurs reportages (dont celui-ci, du New Scientist) ont insisté –peut-être en raison des considérations morales.

Or, c’est là que se situe l’erreur: des embryons ont bel et bien été détruits, ce qu’ACT s’était bien gardée de préciser, au point où Nature a jugé bon, cette semaine, de publier une rétractation.

Dans les pages du Philadelphia Inquirer , le bioéthicien David Magnus s'indigne. ACT "a déjà, dans le passé, fait des annonces douteuses lorsqu’elle avait besoin de financement."

De fait, en 2001, cette compagnie basée au Massachusetts avait annoncé avoir réussi le premier clonage d’embryons humaines, jusqu’à ce qu’on aperçoive que ce qu’elle avait cloné, ce n’étaient que des cellules qui ne s’étaient même pas divisées jusqu’au stade de l’embryon (une centaine de cellules). Mais avant qu’on ne s’en aperçoive, la valeur des actions d’ACT avait eu le temps de monter en flèche (lire: Le clone, la cellule et les dollars).

Cette fois-ci encore, la valeur des actions d'ACT a plus que quadruplé après la publication dans Nature.

L'auteur principal de la recherche chez ACT, Robert Lanza, s'est bien défendu d'avoir voulu induire quiconque en erreur. Et pourtant, note entre autres le Chicago Tribune, dans ses entrevues aux médias, Robert Lanza a spécifiquement dit "qu'aucun mal" n'a été fait aux embryons dont on a extrait une cellule.

Dans un communiqué de presse émis en premier lieu par ACT, il était écrit que ses scientifiques ont créé des cellules souches "en utilisant une méthode qui n'endommage pas les embryons". Interrogé par le Chicago Tribune sur ce communiqué, un éthicien de l'Université de Dartmouth qui a conseillé ACT réplique que cette description n'est pas fausse. "La méthode n'endommage pas les embryons. C'est l'expérience qui les a endommagés."

Malhonnêteté intellectuelle? Le Baltimore Sun le laisse supposer en donnant la parole à William Lensch, de l'Université Harvard: "je pense que l'étude a été rédigée d'une façon si subtile qu'elle est techniquement correcte. Mais ce qu'ils ont annoncé au-delà de l'article, ainsi que sur le site web de Nature ainsi que dans la grande presse, était faux."

D'un autre côté, le refus du gouvernement américain de financer la recherche sur les cellules-souches a peut-être créé cette situation, reproche David Magnus. Ce refus aurait pour résultat de rendre la recherche dépendante de "compagnies petites et sous-financées comme Advanced Cell Technology", davantage susceptibles de grossir leurs résultats pour attirer les investisseurs...

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