L’appétit des baleines revient annuellement sur la table de la Commission baleinière internationale. Accusés par le Japon notamment d’être responsables du déclin des stocks mondiaux de poissons, ces cétacés sont au cœur d’enjeux politiques. Assistera-t-on au retour de la chasse à la baleine?

« Les gens voient ça de manière simpliste : un prédateur = baisse des prises de poissons. Dans la réalité, ce n’est pas aussi évident à prouver surtout que la présence des baleines peut être aussi bénéfique pour le maintien de certaines espèces », explique Lyne Morissette, boursière postdoctorale à l'Arizona State University et travaillant en collaboration avec l'Institut des sciences de la mer de Rimouski (ISMER).

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La chercheuse donnait récemment une conférence au Musée-UQAR sur « L’étude des écosystèmes au service des enjeux politiques mondiaux: l’exemple de la chasse à la baleine ». Elle collabore au projet Whales eat fish des chercheurs Leah Gerber de l'Arizona State University et Kristin Kaschner de l'Université de St. Andrews en Grande Bretagne.

Actuellement, les baleines sont protégées par le moratoire signé en 1986 qui interdit la chasse commerciale. Pourtant, près de 935 cétacés — 850 petits rorquals, 50 rorquals communs et 50 baleines à bosses — font l’objet de la « chasse scientifique » du Japon, dans le cadre d’un programme visant à les étudier (JARPA). L’Islande et la Norvège pratiquent encore la chasse à la baleine, ainsi que les autochtones de différentes régions.

Le retour de la chasse à la baleine?

Dans ses travaux de recherche, Lyne Morissette explore les impacts possibles — à l’aide de simulations informatiques — d’une importante pêche commise par ces cétacés. « Il n’y a, pour l’instant, aucun effet d’une chasse intensive des baleines sur la biomasse », soutient la chercheuse.

Pourtant, la problématique baleines versus pêcherie revient régulièrement dans les discussions visant à réhabiliter la chasse à la baleine. Elle est même le point central de discussion de la Commission baleinière internationale (IWC) pour établir les quotas de la chasse scientifique.

Un argument contestable, pense Lyne Morissette, car jusqu’à présent il n’y avait jamais eu d’étude sur le sujet. « Cet argument [du déclin des poissons dû aux baleines] n’est pas basé sur des connaissances scientifiques. Pour la plupart des chercheurs, c’est une aberration évidente, ce qui explique le manque d’argent alloué jusqu’à présent pour le démontrer », affirme la chercheuse.

Pourtant le Japon, favorable au retour de la chasse à la baleine, s’est fait des alliés. Des pays de la côte nord de l’Afrique (Mali), les îles Salomon (Océanie) ou encore l’île de la Dominique (Pacifique), appuient aujourd’hui le retour de cette chasse.

« Il existe trois zones de conflits politiques dans des zones de reproduction des baleines. Pourtant durant la période de reproduction, elles ne s’alimentent pas », tranche la Rimouskoise qui avoue avoir dû se plonger dans des eaux inconnues, celles de la politique internationale. Elle participera en juin prochain à la Commission baleinière internationale — la 60e édition se déroule du 23 au 27 juin à Santiago au Chili — plus exactement à la rencontre préliminaire du comité scientifique où elle présentera les avancées de son projet.

Pour en savoir plus

Référence

International Whaling Commission (IWC)

Petite biographie de Lyne Morissette

Examining the Impacts of Whales on Commercial Fisheries, projet de recherche du Lenfest Ocean Program (July 2007 - April 2009) de Leah Gerber, Lyne Morissette et Kristin Kaschner

Le site Baleines en direct

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