Des pigeons espionnés, la moindre sortie du pigeonnier détectée grâce à des bagues électroniques… Les gris volatiles vivent-ils dans une société orwellienne? Non, ils sont juste étudiés par des scientifiques qui s’en sont longtemps détournés.

« Comme le pigeon a été domestiqué et vit en constante interaction avec l’homme, les biologistes s’en désintéressent: pas assez sauvage », explique Anne-Caroline Julliard, qui coordonne le projet de recherche. Mais c’est ce qui plaît à la chercheuse au laboratoire écologie, systématique et évolution de l’Université Paris Sud: « vous ne pouvez pas étudier le pigeon sans prendre en considération l’homme. » L’homme le nourrit, mais aussi contrôle sa reproduction, voire l’extermine. Créé il y a trois ans, le groupe de six laboratoires de biologie et de sociologie publie ses premiers résultats.

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D’abord, les travaux génétiques ont montré que les pigeons qui vivent ensemble ne se ressemblent pas plus que ceux qui sont éloignés. Les généticiens en déduisent qu’au moins quelques pigeons ne se reproduisent pas là où ils sont nés. En un mot, ils voyagent.

Or plus ils voyagent, plus ils peuvent recoloniser un lieu où leurs congénères ont été décimés. Donc, exterminer les pigeons à l’échelle locale serait inutile. Reste à savoir s’ils voyagent assez pour repeupler une zone.

Si oui, il vaudrait mieux contrôler la population locale par un pigeonnier. Cela permet aux villes de ramasser les œufs pour empêcher la reproduction des oiseaux. « Mais notre étude montre que les pigeonnes pondent plus quand on retire leurs œufs », note Anne-Caroline Julliard. Est-ce qu’il vaut mieux ramasser huit œufs ou en laisser deux éclore?

D’autant que les oiseaux choisissent leur lieu de reproduction en fonction des succès des années précédentes. Un pigeonnier où l’on pique les œufs est tout de suite moins attrayant. « Les villes choisiront enfin en connaissance de cause, selon les besoins locaux », conclut la chercheuse.

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