L’intérêt des médias pour les changements climatiques est en train de décliner, suggère une étude récente... qui confirme aussi les intuitions de quelques journalistes du domaine. Un retour à la situation des années 1990, quand ce sujet suscitait l’indifférence, ou une bonne chose?

Selon les données de Maxwell Boykoff et Maria Mansfield, de l’Université Oxford, le « pic » de popularité —ou bien le plus gros de la bulle— aurait été atteint au début de 2007. C’était le moment où étaient publiés les différents volumes du dernier rapport du Groupe des Nations Unies sur le climat (le GIEC).

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Depuis, stagnation ou déclin dans la majorité des 50 journaux de 20 pays qui ont été épluchés. Les données de ces chercheurs, qui couvrent la période 2004-2008, ont été présentées à Poznan, en Pologne, en marge de la Conférence des Nations Unies sur les changements climatiques.

Cette tendance à la baisse se vérifie-t-elle à plus long terme? Un sociologue américain, Robert Brulle, avait fait un exercice similaire (publié en début d’année dans Nature ), mais cet exercice s’arrête en 2006 —qui avait été une année cruciale pour la place du climat dans les médias, notamment avec le film d’Al Gore.

Curieusement toutefois, si cette tendance à la baisse se vérifiait, ce ne serait pas nécessairement une mauvaise nouvelle. Andrew Revkin, qui couvre l’environnement au New York Times depuis 15 ans —et qui rapporte cette étude sur son blogue— prévoyait ce déclin en février dernier : le changement climatique, disait-il, cessera bientôt d’être une « histoire » intéressante pour les rédacteurs en chef et les lecteurs... ce qui permettra de passer à des choses plus intéressantes!

Pourquoi cela? Parce que le réchauffement est l’un des pires sujets à vendre à un média : « pas d’impact perceptible, science difficile à faire comprendre, et ça entre en compétition avec le manque chronique d’espace et de temps... » (lire Changements climatiques et médias ne font pas bon ménage)

Mais quand le climat cessera d’être une histoire, le public n’y perdra pas nécessairement au change : les journaux se concentreront plutôt sur les questions d’énergie. Réduction de la dépendance au pétrole, économies, investissements créateurs d’emplois dans l’éolien ou le solaire (un des éléments-clefs du programme de Barack Obama)...

Plus récemment, Revkin ajoutait une autre couche d’explication :

« Le changement climatique n’est pas la plus importante histoire de notre époque. Le changement climatique est un sous-ensemble de la plus importante histoire de notre époque, qui est que nous arrivons à un moment où nous reconnaissons que notre planète n’est pas infinie.

Comment concilier les aspirations infinies d’une espèce qui est lancée sur une trajectoire explosive —pas juste la croissance démographique mais la croissance de son appétit de consommation— comment pouvons-nous faire la transition vers une sorte de relation stable et néanmoins prospère avec la Terre, voilà l’histoire de notre époque. »

Pascal Lapointe

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