En 1959 naissait le Traité de l’Antarctique à la suite des demandes des scientifiques de protéger leur liberté de recherche. Du côté de l’Arctique, l’absence de traité international fait monter de plus en plus les tensions entre le Canada, le Danemark, la Norvège, la Russie et les États-Unis, les cinq États bordant cet océan. L’enjeu est loin d’être scientifique cette fois. Comment résoudre cette impasse? À qui appartiendra le quart des ressources énergétiques non encore découvertes de la planète?

Devant les lobbies des groupes pétroliers, « il faut que les scientifiques soient proactifs et fassent entendre leur voix », encourage Donald Rothwell, professeur de droit international à l’Australian National University et spécialiste du Traité de l’Antarctique.

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Rencontré au congrès Arctic Change 2008, qui s’est tenu à Québec en décembre, il précisait que leur rôle consiste d’abord à mettre en évidence la grande vulnérabilité de l’environnement et à « démontrer que des activités comme l’extraction du pétrole ne sont pas compatibles avec certaines régions de l’Arctique en raison du risque de déversement. »

Depuis 1998, le Traité de l’Antarctique interdit l’extraction de pétrole pour 50 ans avec une possibilité de prolongation. L’apport des scientifiques pourra aussi aider à déterminer les routes de navigation en tenant compte de l’extrême fragilité de l’écosystème.

Mais la naissance d’un traité reste hypothétique, puisque les cinq pays bordant l’Arctique se reposent sur la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer. La Déclaration d’Ilulissat, qu’ils ont signée en mai dernier au Groenland, réitère qu’ils continueront à s’y référer pour « les droits et obligations concernant la délimitation des limites du plateau continental, la protection de l’environnement marin incluant les zones couvertes de glace, la liberté de navigation, la recherche scientifique et les autres usages de l’océan. […] Nous ne voyons donc pas de besoin de développer un nouveau cadre législatif international pour gouverner l’océan Arctique. »

Erreur, selon Donald Rothwell. La Convention des Nations Unies sur le droit de la mer compte plusieurs faiblesses, dont le nombre limité de problèmes qu’elle peut résoudre. Elle présente des manquements quant à l’accès de la mer, elle est muette sur les droits des peuples autochtones et les problèmes engendrés par les changements climatiques extrêmes que cette région subit. « Le temps d’un traité est arrivé. On ne gagne rien à ne rien faire », plaide-t-il.

À l’issue de l’Année Polaire internationale pendant laquelle ont foisonné les recherches sur l’Arctique et les changements climatiques, « cela donne une motivation aux politiciens et aux gouvernements de tenter de répondre au problème », continue-t-il. Une ouverture en ce sens se lit dans la Déclaration d’Ilulissat sur la coopération nécessaire entre les pays : « incluant la collecte de données scientifiques au sujet du plateau continental, la protection de l’environnement marin et d’autres recherches scientifiques. »

« La recherche scientifique est si importante pour comprendre l’Arctique, insiste M. Rothwell. Les scientifiques devraient déclarer “nous désirons continuer à faire librement de la recherche dans l’Arctique, sans que ce territoire devienne le lieu d’une dispute internationale.” »

Qui pourrait superviser le déroulement des travaux du traité? Les États-Unis l’avaient fait dans les années 1950 pour le traité de l’Antarctique, ce qui serait impensable vu leur intérêt maintenant. Les Nations Unies? « Ils ont bien d’autres chats à fouetter sur la planète présentement », rappelle Donald Rothwell.

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